Que valent les indices boursiers des valeurs championnes de la responsabilité sociale d’entreprise (RSE) ? L’affaire BNP Paribas nous éclaire sur la façon dont fonctionnent Vigeo et ses indices. La notation extra-financière se révèle une sacrée tambouille, mais elle trouve avec BNP Paribas un cas d’école particulièrement intéressant, après la condamnation de la banque à une amende record de 9 milliards de dollars le 1er juillet 2014.
Fouad Benseddik, le directeur des méthodes et des relations institutionnelles de Vigeo, est vraiment désolé. Le comité qui gère l’Euronext Vigeo World 120 devra peut-être sortir BNP Paribas de cet indice RSE (responsabilité sociale d’entreprise) mais de toute façon pas avant décembre prochain. « C’est dommage, la banque a une direction RSE vraiment exemplaire aussi bien en ce qui concerne l’environnement que les droits de l’homme » nous confiait-il début juin.
Mais voilà, réaliser des transactions en dollars en les masquant, avec des pays sous embargo américain, pour la justice des Etats-Unis, c’est presque aussi grave que de financer le terrorisme… Et au fait, financer le commerce extérieur du Soudan pendant la guerre du Darfour considérée comme un véritable génocide, est-ce vraiment respectueux des droits de l’homme ?
Début 2013, alors que l’enquête interne qui allait révéler les opérations reprochées à BNP Paribas était déjà en cours dans sa filiale Suisse, comme l’indiquait son document de référence 2012, BNP Paribas Suisse cherchait à convaincre que les pratiques responsables faisaient partie intégrante de ses valeurs. Elle écrivait : « BNP Paribas figure au premier rang mondial du secteur bancaire au sein de l’indice Vigeo World 120 de Responsabilité Sociale et Environnementale ». A présent que BNP Paribas écope d’une amende de près de 9 milliards de dollars, ce n’est pas une bonne publicité pour Vigeo.
Les auditeurs de l’agence de notation extra-financière avaient-ils évalué ce risque d’image et de non conformité pourtant signalé noir sur blanc dans tous les documents de référence depuis 2011 ? Vigeo ne serait-elle pas sensible au respect de la conformité aux normes, aux lois, aux réglementations ? Le directeur des méthodes et des relations institutionnelles de Vigeo acquiesce. « Oui, mais Vigeo exige un respect de la conformité des entreprises aux normes internationales et pas forcément à la réglementation des Etats étrangers » explique-t-il « or, BNP Paribas respectait bien la législation d’organismes internationaux comme l’ONU ».
Des critères éthiques encore flous
Pour intégrer ses indices, Vigeo expliquait en mars 2013, qu’il fallait une des meilleures notation établie sur 38 critères de politique environnementale, de respect des droits de l’homme, de valorisation du capital humain, de relations avec les parties prenantes, de bonnes pratiques de gouvernance et d’influence. Qu’il fallait respecter l’éthique des affaires, lutter contre la corruption et prévenir les dumpings sociaux et environnementaux dans la chaîne d’approvisionnement et de sous‐traitance. Autant de facteurs qui pouvaient garantir, a minima, une bonne réputation durablement et par conséquent une valorisation boursière qui rende les indices Euronext Vigeo attractifs.
Mais la réalité de la notation est manifestement plus empirique. « Pour sortir une entreprise de ses indices, Vigeo évalue la gravité des poursuites et la capacité à mettre en œuvre des mesures correctives. On verra également si la société donne ou non des informations sur ce qui s’est passé » explique Fouad Benseddik qui reconnaît que toutes choses égales par ailleurs, « la ruine de la réputation d’une société est aussi une bonne raison de la sortir de l’indice ».
C’est ce risque qui a poussé Vigeo à lancer une alerte. Ce mercredi 2 juillet, l’agence a finalement décidé de publier un communiqué pour se prononcer sur la dégradation de la notation financière de BNP Paribas de 2 points, sans plus de détail sur son échelle de notation. La banque n’est pas épinglée pour le non respect de conformité, mais Vigeo a repéré quatre manquements. BNP Paribas a failli en ce qui concerne l’éthique des affaires, l’efficience de ses procédures d’audit et de contrôle, la protection des droits des minoritaires et la prévention des risques d’atteinte aux droits de l’homme dans la conduite des transactions dans des zones en situation de conflit.
Prochaine étape après cette alerte, la sortie de BNP Paribas de l’indice Euronext Vigeo World 120 sera discutée en novembre ou décembre 2014.
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Le problème des conflits d’intérêts et jugements subjectifs des analystes des agences de notation est une des causes de la « crise » actuelle. Ceci est bien décrit dans notre blog que je vous invite à lire:
http://ontonixqcm.wordpress.com/