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Faire appel à la foule (crowd) pour financer un projet (funding) : le crowdfunding part d’une intention louable, mais attention aux risques de perte et d’arnaques souvent sous-estimés auprès de ce type d’intermédiaires financiers pas toujours très réglos. (photo © GPouzin)

Le problème de la finance participative est que le crowdfunding, sous son visage sympathique, est aussi un boulevard facilitant l’accès de nombreux escrocs à l’épargne publique. Il suffit de s’inventer un projet écolo, ou techno, ou d’entrepreneuriat social dans la tendance du moment, ou au contraire miser sur l’appât du gain avec un mirage immobilier, ou n’importe quel château en Espagne, pour convaincre des épargnants confiants de donner leurs économies, souvent en échange d’une promesse de rendement élevé pour couronner le tout.

C’est ce que dénonçait Deontofi.com il y a exactement deux ans, en illustrant cette inquiétude avec une arnaque à la finance participative de grande envergure.

Coup dur pour la finance participative : 900 000 épargnants floués !

Deux ans plus tard, et quatre ans après la légalisation de l’appel public à l’épargne participatif dans le cadre du statut d’intermédiaire en financement participatif créé par l’ordonnance du 30 mai 2014 (lire ici), les autorités financières tentent de mettre en place des garde-fous supplémentaires, pour améliorer l’information des épargnants sur les risques de pertes liées à leurs placements participatifs. Conscientes de la fragilité de ces intermédiaires, leurs superviseurs souhaitent aussi améliorer les précautions pour protéger les épargnants ayant apporté de l’argent en prêts ou en capital via des plate-formes de financement participatif, au cas où elles disparaîtraient.

Les deux mesures annoncées portent sur

  • le calcul et la publication de taux de défaillance par les plateformes ;
  • la mise en place d’un dispositif de gestion extinctive pour les plateformes.

Mieux informer des pertes sur le crowdfunding

Le calcul et la publication du taux de défaillance est une information importante, même si elle ne porte que sur le passé sans présager de l’avenir pour les nouveaux projets financés par les épargnants.

D’un point de vue pédagogique il est crucial que les épargnants comprennent que lorsqu’on les sollicites pour prêter 10 000 euros à une entreprise leur garantissant un taux d’intérêt de 6% ou 7% par an avec la garantie de récupérer leur capital en obtenant le remboursement de leur prêt à l’échéance, hé bien ce n’est pas garanti du tout, car l’entreprise peut ne pas rembourser pour toutes sortes de raisons tenant à des difficultés économiques ou à la malhonnêteté de ses dirigeants, voire les deux, comme dans le cas du groupe hôtelier Maranatha.

Malheureusement, les réglementations ne concernent que ceux qui les respectent. Or, comme on l’a vu avec les arnaques au trading, diamants, Bitcoin sur Internet, ou avec les arnaques aux énergies renouvelables, placements vin, lettres et manuscrits et autres biens divers, les vrais escrocs se moquent bien qu’il y ait des réglementations plus strictes, puisqu’ils n’en respectent aucune.

Pour plus de détails sur ces évolutions, Deontofi.com reproduit ci-dessous le communiqué de presse commun des autorités du 2/2/2018.

L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et l’Autorité des marchés financiers (AMF) précisent leurs attentes vis-à-vis du financement participatif – crowdfunding

Dans le cadre de leur Pôle commun, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et l’Autorité des marchés financiers (AMF) ont mené une action conjointe afin d’améliorer la protection des clients et investisseurs en financement participatif. Elles publient aujourd’hui à l’intention des différents professionnels – intermédiaires en financement participatif, conseillers en investissements participatifs et prestataires de services d’investissement – une position relative aux modalités de calcul des taux de défaillance, une recommandation sur la gestion extinctive et une position sur la commercialisation des offres de financement participatif.

Le cadre réglementaire du financement participatif mis en place en 2014 et actualisé en 2016 a créé différents statuts d’intermédiaires liés aux produits commercialisés :

  • les conseillers en investissements participatifs (CIP), pour les investissements en capital, les obligations et les minibons, supervisés par l’AMF ;
  • les intermédiaires en financement participatif (IFP), pour les dons ou les prêts – avec ou sans intérêts. Les IFP relèvent de la compétence de l’ACPR.

La réglementation pour les intermédiaires en financement participatif en prêt participatif et pour les conseillers en investissements participatifs et prestataires de services d’investissement (PSI) commercialisant des minibons, prévoit notamment :

  • le calcul et la publication de taux de défaillance par les plateformes ;
  • la mise en place d’un dispositif de gestion extinctive pour les plateformes.

La position 2017-P-02 de l’ACPR et la position-recommandation DOC-2018-02 de l’AMF précisent la méthodologie de calcul et publication des taux de défaillance(1).

Ces taux de défaillance doivent permettre aux clients et aux prospects d’apprécier la qualité des plateformes au cours des trois dernières années d’activité.
Les précisions méthodologiques apportées par les deux autorités devraient contribuer à une homogénéisation des publications trimestrielles et annuelles des plateformes.

La recommandation 2017-R-02 de l’ACPR et la position-recommandation DOC-2018-02 de l’AMF relatives à la mise en place d’un dispositif de gestion extinctive(2) ont pour objectif que les opérations de financement puissent être menées jusqu’à leur terme en cas d’arrêt d’activité de la plateforme.
Les deux Autorités recommandent aux professionnels d’identifier les processus clés indispensables à la continuité des prestations fournies aux clients, prêteurs ou porteurs de projet. Elles les invitent également à prévoir et à tester à l’avance les conditions de la reprise de ces processus par un tiers en cas d’arrêt de la plateforme. Enfin, elles rappellent les informations pertinentes à communiquer aux utilisateurs de la plateforme.

La position-recommandation DOC-2018-02 de l’AMF pour les conseillers en investissements participatifs et prestataires de services d’investissement opérant en financement participatif apporte en outre des précisions sur :

  •  la mise en place d’un accès progressif réel à l‘information sur les offres ;
  • l’équilibre, la clarté, l’exactitude et le caractère non trompeur de l’information sur les plateformes, que ce soit sur les avantages et les inconvénients de leurs services ou des offres de financement qu’elles diffusent et ce par tout moyen y compris les médias sociaux ;
  • en particulier l’ensemble des frais payés en rémunération des services des plateformes et les risques inhérents à chaque offre ;
  • Enfin, les plateformes doivent être vigilantes quant à l’information publicitaire (dit « à caractère promotionnel ») qu’elles adressent à leurs clients.

À propos de l’ACPR

Adossée à la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution est l’autorité administrative qui contrôle les secteurs de la banque et de l’assurance et veille à la stabilité financière. L’ACPR est également chargée de la protection de la clientèle des établissements contrôlés et assure la mission de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Elle est aussi dotée de pouvoirs de résolution. Visitez notre site https://acpr.banque-france.fr/

À propos de l’AMF

Autorité publique indépendante, l’AMF est chargée de veiller, à la protection de l’épargne investie en produits financiers, à l’information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés.
Visitez notre site www.amf-france.org

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