Chaque mois, le médiateur de l’Autorité des marchés financiers (AMF) décrypte un cas pratique de médiation et les leçons concrètes qu’on peut en tirer. Ce mois-ci (1er février 2023)
Mini-offres publiques sur actions américaines : attention aux pièges !
Certaines opérations sur titres relatives à des sociétés cotées aux Etats-Unis, appelées « mini-tender offers » et non régulées, ont pu être relayées par des teneurs de comptes français auprès d’actionnaires français qui détenaient de tels titres américains. Or, à l’occasion de l’instruction du dossier que je vous présente ce mois-ci, j’ai pu observer que l’une d’entre elles recélait un caractère nécessairement défavorable aux vendeurs potentiels.
La médiation a permis à l’actionnaire français de sortir du piège et de faire évoluer la pratique de ce teneur de compte vis-à-vis de ces mini-tenders.
Les faits
M. T indiquait avoir reçu, le 3 septembre 2020, un courrier de la part de son teneur de compte, l’informant d’une proposition d’achat de la totalité ou d’une partie de ses actions X, émises par une société américaine cotée au NASDAQ, au prix de 48 dollars par action faite par la société P. alors que le cours du moment était de 35 dollars.
Il précisait que ce courrier mentionnait le 23 novembre 2020 comme étant la date limite de réception du talon réponse et indiquait également la possibilité de révoquer son souhait de participer à cette offre d’achat, « à tout moment, jusqu’à la clôture de l’offre ».
Le 25 septembre, soit deux mois avant la date limite, M. T a alors confirmé son souhait de participer à cette opération d’achat. Toutefois, passé le 23 novembre 2020, ses actions figurant toujours sur son compte, M. T a légitimement pensé que son instruction n’avait pas été prise en compte dans la mesure où l’initiateur n’envisageait d’acquérir qu’un nombre limité de titres.
Cependant, le 16 mars 2021, M. T a été informé que la totalité de ses actions avait finalement été cédée dans le cadre de l’offre.
M. T s’est rapproché de son teneur de compte et a fait valoir qu’il n’était aucunement mentionné que son accord pour participer à cette offre d’achat s’étendrait sur plusieurs mois, bien au-delà de la date du 23 novembre 2020.
Estimant avoir été induit en erreur, M. T considérait que cette situation lui avait causé un préjudice qui s’élevait à 2 750 dollars, soit la différence entre le cours de ses actions au 16 mars 2021 (60 dollars) auquel il aurait pu vendre ses actions sur le NASDAQ et le montant reçu dans le cadre de l’offre au prix de 48 dollars par action.
Pour en savoir plus:
La SEC rappelle ainsi que les mini-tender offers, visant à acquérir moins de 5% des actions en circulation d’une société, évitent ainsi de nombreuses exigences de divulgation et de procédure auprès de ses services, lesquelles s’appliquent aux offres portant sur plus de 5% des actions en circulation d’un société. Par conséquence, les mini-tender offers n’offrent pas le même niveau de protection que celui fourni par des offres d’achat plus importantes en vertu des lois américaines sur les valeurs mobilières.
En outre, la SEC avertit les investisseurs que certains initiateurs faisant des mini-tenders à des prix inférieurs au marché espèrent prendre au dépourvu les investisseurs si ces derniers ne comparent pas le prix de l’offre au prix actuel du marché et que d’autres initient des mini-tenders avec une prime en pariant que le prix de marché augmentera avant la clôture de l’offre, puis en la prolongeant jusqu’à ce soit le cas.
Par ailleurs, au cas d’espèce, j’ai également relevé que l’émetteur X, la société cotée visée par cette « mini-offre » non sollicitée, avait publié le 28 juillet 2020 un communiqué recommandant à ses actionnaires de ne pas donner suite à cette offre dans la mesure où celle-ci était conditionnée au fait que le cours, à la clôture de l’offre, soit supérieur à 48 dollars.
[1] https://www.sec.gov/reportspubs/investor-publications/investorpubsminitendhtm.html
https://www.investor.gov/introduction-investing/investing-basics/glossary/mini-tender-offers
Lire la suite ici sur le Journal de bord du médiateur de l’Autorité des marchés financiers.