Pour favoriser l’investissement productif de l’épargne nationale, en soutien aux entreprises de taille moyenne et intermédiaires (ETI) ou aux petites et moyennes entreprises (PME), le gouvernement a créé en 2014 un nouveau Plan d’épargne en actions (PEA) dédié à ces investissements. Alors que les professionnels lancent des campagnes de promotion pour inciter les épargnants à y souscrire, le PEA PME-ETI manque de clarté et d’ambition pour séduire un plus grand nombre d’épargnants. Explications.
Ah, la belle idée du PEA-PME-ETI ! Dans un grand élan de mobilisation de l’épargne à long terme favorisant le développement de nos entreprises de taille intermédiaires (ETI) et petites ou moyennes entreprises (PME), les dirigeants de notre pays ont, avec l’appui du lobby du capital risque, promu la création d’un nouveau compte titres défiscalisé : le Plan d’épargne en actions PME-ETI. Déjà, on pouvait douter de l’efficacité de ce dispositif et de ses chances de séduire les épargnants, alors que le Plan d’épargne en actions (PEA) classique offre des avantages plus étendus et qu’il est loin d’avoir fait le plein, que ce soit en nombre de détenteurs comme en montant d’épargne par rapport au plafond. Au 15 septembre 2014, à peine 80 000 PEA-PME avaient été ouverts, comme l’annonçait alors François Hollande aux Assises du financement et de l’investissement, un chiffre à comparer aux 7 millions de PEA bancaires classiques ayant attiré 70 milliards d’euros d’épargne (soit 10 000 euros d’encours moyen par PEA).
Le PEA classique, créé en septembre 1992 et réformé plusieurs fois depuis (relèvement du plafond, etc…), permet de verser jusqu’à 150 000 euros qui devront être investis en actions de sociétés européennes cotées sur un marché européen (lire à ce sujet « Quel intermédiaire pour investir directement en actions étrangères ? »). En pratique, on peut néanmoins diversifier son PEA au-delà des frontières européennes par le biais de fonds d’investissements cotés (ETF ou Exchange traded funds) de type trackers, qui suivent un indice boursier non européen (Etats-Unis, Japon, marchés émergents…) tout en respectant techniquement les critères d’éligibilité au PEA. L’avantage du PEA est que les plus-values et dividendes ne subissent que les prélèvements sociaux (15,5% à ce jour pour 2014) sur les gains retirés après cinq ou huit ans par rapport à la date d’ouverture du plan (un retrait avant cinq ans est plus taxé, un retrait entre cinq et huit ans entraîne la clôture du PEA, mais pas après).
Le PEA PME-ETI, officiellement lancé début 2014, est censé favoriser l’investissement des épargnants dans un sous-ensemble des entreprises éligibles au PEA classique, dès lors qu’elles respectent certains critères de taille, en bénéficiant d’un cadre fiscal comparable dans la limite d’un plafond de versements de 75 000 euros, cumulable avec celui d’un PEA classique. Autrement dit, on ne voit que deux véritables avantages à ouvrir un PEA PME en plus d’un PEA classique : soit pouvoir investir davantage si l’on a déjà atteint le plafond de versement sur son PEA classique, soit avoir un PEA distinct pour ses investissements en petites valeurs, par exemple pour ne pas être dépendant d’un seul courtier en ligne si l’on gère soi-même son portefeuille, ou pour en confier la gestion à un autre établissement si l’on préfère le faire gérer par des professionnels spécialisés.
Le PEA-PME peine à décoller
On comprend que le PEA PME-ETI n’intéresse qu’une petite proportion d’épargnants. Si c’est votre cas, vous n’êtes pourtant pas au bout de vos peines, car le PEA PME-ETI est une véritable usine à gaz dont personne ne semble maîtriser pleinement la tuyauterie, y compris ses promoteurs.
En théorie, les critères d’éligibilité au PEA PME-ETI semblent assez simples : ils concernent principalement des sociétés employant moins de 5000 salariés, avec un chiffre d’affaires inférieur à 1,5 milliard d’euros ou un total de bilan inférieur à 2 milliards d’euros.
En pratique, l’appréciation des critères d’éligibilité, comme leur reconnaissance, est un casse-tête infernal ! Faut-il compter les salariés et examiner les seuils financiers au niveau de l’entreprise ou au niveau consolidé avec ses filiales ou sa société mère ? Et si la société fait partie d’un groupe, dans quelles proportions apprécier sa contribution ou celle de ses participations aux critères d’éligibilité ? Qui décide si les titres d’une société sont éligibles ou non au PEA PME ? La société elle-même ? Le détenteur du PEA PME ? Son intermédiaire, courtier ou gérant ? Le prestataire dépositaire ou teneur de compte de cet intermédiaire ? Ou encore le marché sur lequel sont cotés les titres, comme Euronext, voire l’administration elle-même ?
En cherchant les réponses à ces questions, le directeur général et co-fondateur de la société de gestion de portefeuille Constance Associés, Nicolas Braun, a mis le doigt sur des imprécisions et incohérences de la réglementation et de son interprétation, qui rendent la gestion d’un PEA PME particulièrement complexe et incertaine. Deontofi.com l’a rencontré alors qu’il préparait une demande de rescrit à l’administration fiscale, procédure visant à obtenir l’avis du fisc sur la méthode mise en œuvre par un contribuable pour respecter la réglementation fiscale.
Suite. Lisez l’interview : « Le PEA PME ne doit pas être fermé aux valeurs moyennes européennes ! ».
Lire aussi ici : la fiche officielle du ministère des finances sur les caractéristiques du PEA classique et PEA PME-ETI .