La médiatrice de l’AMF met en garde les épargnants contre les arnaques par Internet, avec le risque de « double peine » pour les naïfs qui goberaient les fables de « récupération de fonds» (photo © GPouzin)

Aucune parade légale ne semble pouvoir stopper le rouleau compresseur des escroqueries en ligne. Le modèle économique de l’industrie des escroquerie à distance est sa principale force. Les escrocs n’ont aucun coût de conformité (puisque ne respectant aucune loi), et disposant d’une manne financière sans contrepartie (ils ne rendent jamais l’argent aux victimes). Dès lors, leurs coûts d’exploitation se limitent aux miettes versées à leurs télédémarcheurs (mythos pathologiques) et aux gigantesques budgets de marketing dont ils arrosent les géants du web pour diffuser leurs campagnes de promotion. Ces annonceurs-voleurs représenteraient jusqu’à 20% des recettes des réseaux sociaux, selon certaines estimations. Une partie de cet argent est notamment dépensé auprès de complices de cette promotion pour accréditer l’idée qu’on pourrait récupérer ses pertes en cas d’arnaque, car c’est une autre manière de rassurer les prospects pour les convaincre de se faire arnaquer.

Dans son rapport annuel 2020, la médiatrice de l’AMF met une nouvelle fois en garde les épargnants contre les arnaques par Internet, en rappelant le risque de « double peine » aux naïfs qui goberaient les fables des marchands de « récupération de fonds ». Voici ses conseils :

Quelle attitude doit adopter l’investisseur lorsqu’il s’aperçoit qu’il a été victime d’une escroquerie ?

Surveiller ses comptes et alerter immédiatement sa banque. Si l’on réagit très vite, une procédure de recall ou de retour peut être tentée par la banque de la victime auprès de la banque de l’escroc. Toutefois, cela suppose que les sommes litigieuses soient toujours présentes sur le compte de l’escroc. Or, en pratique, on se rend compte que les escrocs transfèrent immédiatement les sommes reçues, car ils ont fermé et ouvert une multitude de comptes au nom de diverses sociétés. En outre, les virements sont étalés dans le temps, de sorte que seul le dernier virement a des chances d’être rappelé. De surcroît, cette démarche est très limitée puisqu’elle dépend de la législation du pays où est situé le compte. On s’aperçoit que généralement la banque conditionne le retour des fonds à l’obtention d’une autorisation du titulaire du compte (c’est-à-dire de l’escroc).

 Faire preuve de méfiance pour éviter a minima « la double peine » : il ne faut surtout pas donner suite aux courriers électroniques ou aux appels non sollicités de prétendus avocats ou institutions qui prétendent avoir miraculeusement retrouvé les fonds perdus, mais qui conditionnent le remboursement de la victime à un dernier virement (censé correspondre à un impôt ou à des frais en tout genre). Les données personnelles des épargnants circulent, en effet, d’escrocs à escrocs et il est fréquent que les épargnants soient de nouveau sollicités par des arnaqueurs. Ce que le médiateur a qualifié de « double peine » dans ses rapports annuels précédents.

 Alerter l’AMF et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

 Un recours amiable contre les établissements bancaires des escrocs (situés la plupart du temps au sein de l’EEE). Une médiation, sous l’égide du médiateur de l’AMF, avec des établissements financiers étrangers ne pourra pas être entreprise, car ces établissements ne relèvent pas du champ de compétence de l’AMF et, par extension, de son médiateur. Toutefois, si l’épargnant le souhaite malgré tout, il peut tenter d’effectuer une réclamation auprès de la banque étrangère et, en cas d’échec, saisir le médiateur correspondant (coordonnées ci-dessous).

 Déposer plainte contre la société frauduleuse au commissariat ou à la gendarmerie, si le total des sommes perdues est inférieur à 10 000 euros ou envoyer sa plainte au tribunal judiciaire de son lieu de résidence, si le total des sommes perdues est supérieur à 10 000 euros. Toutefois, malheureusement, les escrocs sont bien souvent déjà loin et l’argent initialement versé sur un compte ouvert, la plupart du temps, dans un pays de l’EEE a été transféré plusieurs fois vers des comptes ouverts dans des banques souvent situées hors de l’EEE, dans des pays à la législation très clémente et peu coopératifs. Il ne faut donc pas se leurrer, les chances d’obtenir réparation sont infimes.

ATTENTION !

Si, auparavant, le médiateur pouvait recommander aux épargnants de vérifier que la société avec laquelle ils étaient en relation figurait bien sur le Registre des agents financiers (Regafi), ce n’est désormais absolument plus suffisant. En effet, en ayant recours aux usurpations, les prédateurs donnent l’illusion de disposer des autorisations et agréments nécessaires à la fourniture des services d’investissement.

En outre, il convient de rappeler que les listes noires diffusées par l’AMF sont loin d’être exhaustives : ce n’est pas parce que la société ne figure pas sur ces listes qu’elle est fiable.

Il est donc impératif, avant d’effectuer tout placement proposé par une voie non conventionnelle, de demander l’avis de son conseiller financier ou d’appeler Epargne Info Service, la plateforme créée par l’AMF pour répondre aux questions des épargnants sur les produits d’épargne financière, les intermédiaires financiers ou encore les possibles arnaques à l’investissement.

La plupart du temps, le nom des sociétés à destination desquelles les épargnants effectuent des virements diffère du nom de la plateforme internet. Or les listes noires de l’AMF, qui ne peuvent être exhaustives, ne mentionnent que le nom des plateformes internet exploitées par les escrocs.

Liste des médiateurs européens en matière de litiges financiers (coordonnées)

La liste des membres du réseau FIN-NET (réseau d’organismes nationaux chargés de traiter par voie extrajudiciaire les plaintes de consommateurs), les services financiers qu’ils couvrent, les langues dans lesquelles ils travaillent et leurs coordonnées sont disponibles à l’adresse suivante : https://ec.europa.eu/info/businesseconomy- euro/banking-and-finance/consumerfinance- and-payments/retail-financial-services/financialdispute- resolution-network-fin-net/fin-net-network/ members-fin-net-country_fr

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