
Attention, mieux vaut toujours éviter les mauvais placements, en lisant Deontofi.com avant de signer, que réclamer justice de son préjudice, face à des financiers malhonnêtes capables d’esquiver les procès.
L’affaire du présent procès commence il y a dix ans, quand des épargnants tombent dans les griffes de Leonteq, par l’intermédiaire de conseillers-vendeurs de placements sous emprise du fabriquant suisse de produits structurés, avec la complicité des assureurs ayant aidé à emballer les tromperies de ces produits, dans des unités de compte (UC) en assurance-vie.
Des procès contre Leonteq, il y en a depuis des années, si ce n’est depuis le début. La première fois que j’ai entendu parler de Leonteq, en 2018, c’était déjà parce que ses produits structurés toxiques étaient poursuivis en justice. En enquêtant un peu, j’avais retrouvé à cette occasion un litige antérieur par des clients britanniques plumés, récemment sous les projecteurs.
Cependant, la plupart de ces procès s’enlisent, embourbés par la résistance de Leonteq à l’exercice de la justice, comme on l’a vu face aux exigences des réglementations : contournements, esquives, manipulations, dissimulations, occultations, diversions, contestations.
C’est le cas du procès intenté par des souscripteurs s’étant fait laminer leur épargne par un bonneteau de produits structurés Leonteq.
Sept plaignants ayant investi 13 millions d’euros, dans des mandats de produits structurés Leonteq habillés en « fonds internes dédiés » (FID) vendus sous forme d’UC dans leurs assurances-vie, ont perdu près de 11 million d’euros en capital, soit près de 84% de leur mise initiale. En ajoutant à leurs 10,9 millions de pertes bien réelles, les 5,3 millions d’euros de gains potentiels illusoires, que Leonteq leur faisait miroiter, leur préjudice total dépasse même 16 millions d’euros.
Défendus par le cabinet d’avocats Nicolas Lecoq-Vallon & Hélène Feron-Poloni (NLV-HFP), ces victimes des produits structurés toxiques ont intenté, en 2020, un procès contre Leonteq et les assureurs les ayant référencés dans leurs contrats multisupports : Cardif (BNP Paribas Assurances), Natixis Life (groupe Banque Populaire Caisse d’Epargne) et La Mondiale Europartner (AG2R La Mondiale).
Depuis cinq ans, ce procès intenté par les victimes françaises de Leonteq est un florilège de ses pratiques les plus scabreuses, mettant aussi en lumière le rôle des assureurs ayant facilité les tromperies de Leonteq, par une complicité passive ou active, mêlant l’incompétence et la cupidité.
- Résumé du litige :
Leonteq a proposé aux requérants d’investir leur épargne dans des produits financiers, notamment des produits structurés (EMTN). Ces contrats, indexés sur un panier d’actions, peuvent générer des gains (plus-values, coupons) avec une protection du capital.
« Les produits structurés sont des contrats par lesquels le Prestataire de Services d’Investissement (PSI) propose un produit indexé sur un panier d’actions appelé « sous-jacent » qui, par son évolution au gré des marchés financiers et la souscription concomitante d’options à la hausse et à la baisse, peut dégager des gains sous forme de plus-values et de coupons, et qui sont présentés comme offrant un mécanisme de « protection du capital ». »
Les gains sont calculés par Leonteq, basés sur des dates d’observation trimestrielles jusqu’à une date de constatation finale (2 à 4 ans). Les requérants ont souscrit via des comptes titres ou des contrats d’assurance vie/capitalisation auprès de Cardif (BNP Paribas Assurances), Natixis Life (groupe Banque Populaire Caisse d’Epargne) et La Mondiale Europartner (AG2R La Mondiale).
« La détermination des gains devait être calculée par la société LEONTEQ en fonction de « dates d’observation » se produisant tous les trois mois à compter de la date de souscription du produit jusqu’à une date de « constatation finale », devant, en général, intervenir deux à quatre ans plus tard. »
À chaque souscription ou arbitrage, ils devaient recevoir une fiche produit (TermSheet). Ces documents, de 4 à 7 pages, décrivent l’allocation de coupons, les plus-values à terme et la restitution du capital.
« A chaque souscription, que ce soit dans le cadre de la gestion de leur compte titre ou d’un arbitrage dans le cadre de la gestion de leur contrat d’assurance vie ou de capitalisation, les requérants étaient censés recevoir une fiche « produit » ou « TermSheet » (TS) versée aux débats. »
Les souscriptions (2015-2019) impliquaient de multiples sorties anticipées et de nouvelles souscriptions conseillées par Leonteq. En 2019, les requérants ont subi d’importantes moins-values, perdant la quasi-totalité de leur capital, sans distribution de coupons, en raison d’erreurs dans les TermSheets.
« Les requérants ont constaté en 2019 que ces enchaînements de souscriptions aboutissaient à d’importantes moins-values se traduisant par la perte de la quasi-totalité de leur capital et la non-distribution des coupons. »
Le juge de la mise en état a rejeté cette fin de non-recevoir (Pièce n°90). Les assureurs ont tardivement communiqué les documents contractuels après une sommation et un incident soulevé par les épargnants, témoignant de la résistance des vendeurs de structurés à révéler leurs défaillances. « Le juge de la mise en état a logiquement, et à bon droit, rejeté cette fin de non-recevoir dans une ordonnance du 9 septembre 2021 (Pièce n°90). »
- Pas de prescription avant la découverte du préjudice :
Face au tir de barrage des bancassureurs pour esquiver leur responsabilité, les clients se voient d’abord contester leur droit de réclamer justice, au prétexte qu’ils auraient attendu trop longtemps et que leur action serait « prescrite » puisque lancée plus de cinq ans après leurs souscriptions.
Une défense classique des marchands de placements, pour se défausser de leurs responsabilités, mais qui ne tient pas la route juridiquement, car le délai de prescription ne peut démarrer qu’à partir de la connaissance du préjudice à l’origine de leur demande d’indemnisation, et non à la date de souscription quand les gains qu’on leur fait miroiter sont encore à l’état de belles promesses.
Cet argument est donc fallacieux, dès lors que les souscripteurs de ces produits structurés, dont les échéances de remboursement peuvent aller jusqu’à dix ou douze ans, ne pouvaient pas savoir qu’ils s’étaient fait plumer, avant de découvrir le pot aux roses.
Le cabinet d’avocats Lecoq-Vallon & Feron-Poloni invoque dans ce sens une dizaine de décisions de justice ayant fait jurisprudence, dont trois arrêts de la Cour de cassation.
La Cour de cassation a jugé que la connaissance du préjudice en assurance vie (EMTN) n’est effective qu’au rachat du contrat. Le préjudice est évalué au regard de la moins-value constatée sur le support.
« La jurisprudence retient ainsi que s’agissant du point de départ de la prescription : […]. La date retenue en tant que point de départ de la prescription doit être celle de la réalisation du dommage, qui ne saurait être antérieure au rachat du contrat d’assurance vie (Cass Com, 21 juin 2023, n°21-16716 et 21-19853 (ou à tout le moins, au terme du produit structuré EMTN). »
- Défaut d’information et pertes cachées :
L’invocation d’une prétendue prescription par les assureurs et Leonteq pour empêcher leurs victimes de réclamer justice, est d’autant plus cynique que ces institutions ont elles-mêmes caché leurs pertes aux clients, en refusant de leurs fournir les relevés retraçant leurs bévues !
« Il est constant en l’espèce que les requérants n’ont pu prendre connaissance de l’existence de leurs préjudices qu’à compter de la date à laquelle leur a été effectivement notifié, de manière claire et personnalisée, leurs pertes définitives sur les unités de comptes en cause.
Tel n’a pas été le cas dans la mesure où il leur aura fallu que les concluants assignent les compagnies et la société défenderesse pour obtenir enfin communication de leurs relevés de situation et qu’elles puissent savoir avec certitude qu’elles avaient subi un préjudice important. (Pièces n°74-P, Q, R) » (p.17/77)
L’affaire a éclaté grâce à une modeste société de conseil en gestion de patrimoine du Lubéron, CARA, ayant découvert bien malgré elle, le fossé entre les belles promesses de son fournisseur de produits structurés Leonteq, et la réalité des manœuvres menant à la ruine de ses clients.
Comme on l’apprend dans les conclusions du cabinet NLV-HFP « La société CARA écrit dans ses dernières écritures : « CARA et les investisseurs n’ont soupçonné l’existence de ces vices qu’à compter de la publication d’un article en janvier 2019 dans la revue « Gestion et Fortune », ce qui a été confirmé par la suite par les rapports de la « Financière de Martignac » et de Monsieur Wattine des 26 octobre et 30 novembre 2021 » 1 (Pièces n°46 et n°91). »
« Les informations transmises par les défendeurs (ndlr en particulier Leonteq) étaient erronées, voire falsifiées, avec des valeurs de référence EMTN fausses ».
« Les affirmations mensongères de la société LEONTEQ, et des autres défenderesses, retirent tout crédit à leurs thèses sur la prescription », poursuit Maître Nicolas Lecoq-Vallon.
Le dossier que j’avais rédigé pour Gestion de Fortune aura donc au moins aidé quelques consciencieux lecteurs de ce magazine professionnel à se méfier du bonneteau des produits structurés. Nous y reviendrons.
- Mandats déguisés en fonds dédiés et non-respect des règles UC en assurance-vie :
Les mandats de produits structurés de Leonteq, référencés comme FID en unités de compte, ne respectaient pas les règles du Code des assurances.
« L’attestation d’un expert financier versée aux débats relève à juste titre que : « De manière générale, nous constatons en préalable que l’émetteur, le garant, le gestionnaire et l’agent de calcul sont Léonteq ou une société ayant des liens capitalistiques avec Leonteq. Par ailleurs, il n’y a pas de double valorisation du produit. Dans ce contexte, nous observons plus d’opacité que sur d’autres produits réalisés sur le marché. »(Pièce n°46). »
Les FID/EMTN ne remplissaient pas les conditions des articles L 131-1, R 331-1 et R 332-2 du Code des assurances. Les assureurs ont validé l’intégration de ces produits manipulés illégalement par Leonteq.
« Tel n’a pas été le cas en réalité puisque ces produits ne pouvaient servir de valeurs de référence à des contrats souscrits en France dans la mesure où ils étaient manipulés par la société LEONTEQ dans des conditions totalement illégales. »
Les assureurs ont agi comme agents de blanchiment, légalisant la commercialisation de produits interdits. Les clients, non avertis, ont consommé leur épargne en croyant percevoir des coupons.
« En effet les clients, bien évidemment non avertis, n’ont pas compris qu’ils consommaient leurs épargnes au titre de ces opérations alors qu’ils croyaient percevoir des coupons, comme cela résulte du discours mensonger qui leur a été tenu, ainsi qu’à la société CARA, notamment par les mails envoyés par la société LEONTEQ. (Pièces n°49 à 67). »
- Interdiction de la commercialisation en France et inéligibilité à l’assurance vie :
« Les assureurs n’ont pas justifié que leurs salariés pouvaient conseiller ces produits, poursuit Maître Lecoq-Vallon dans ses conclusions. Les EMTN Leonteq étaient interdits à la commercialisation en France, comme indiqué dans la documentation contractuelle ». « Et ce d’autant que les assureurs n’ont pas justifié dans la présente procédure que leurs propres salariés disposaient des éléments leur permettant de délivrer à leur client les informations et conseils adaptés à ces produits », insiste l’avocat des épargnants. (Pièces n°93).
Saga Leonteq, saison 2:
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- C / Leonteq, barattage à tous les étages
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