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Croyez-vous que tous les placements vendus en France par les banques sont autorisés (photo © GPouzin)

Comme dans les affaires ID Formation et Eramet, et comme l’a bien souligné la FINMA suisse dans sa sanction, Leonteq n’avait pas le droit de distribuer ses produits structurés aux épargnants français qui lui réclament réparation, car ils étaient interdits en France dans cette configuration de leur distribution.

Avant de détailler le bonneteau auquel se livrait Leonteq par un jeu de barattage dans les mandats déguisés en « fonds d’investissement dédiés » (FID) de ses clients, l’avocat des épargnants explique que ces opérations étaient de toute façon illicites, puisqu’elles portaient sur des placements interdits en France.

 « 30.II – 3.2 Sur la nullité des arbitrages résultant du fait que les EMTN en cause étaient interdits de commercialisation en France » (P.56/57 des conclusions NLV-HFP) :

« La société LEONTEQ s’est comportée comme un conseil en investissement financier (CIF) et une société d’investissements or, elle n’avait pas la qualification de CIF et ne pouvait donc être société d’investissements », relève Maître Nicolas Lecoq-Vallon.

« Elle a donné des conseils à la société CARA et s’est comportée comme le contrôleur de cette dernière qui avait alors un rôle de distributeur, LEONTEQ étant l’émetteur. Ce contrôle a été incorrectement exercé et évidemment dans le seul intérêt de LEONTEQ qui en a profité pour diffuser des EMTN interdits en France, poursuit l’avocat des épargnants. De surcroît, le seul agrément obtenu en France par la société LEONTEQ était formellement inefficient en raison du licenciement de Monsieur H (anonymisé par Deontofi.com), seule personne physique habilitée à représenter son employeur, la société LEONTEQ. »

« Les EMTN en cause ne bénéficiaient pas d’un passeport européen », insiste l’avocat.

De surcroît, la société LEONTEQ n’a pas respecté les dispositions de l’article 212-28 du Règlement Général de l’AMF prévoyant l’enregistrement de prospectus des EMTN auprès de l’AMF préalablement à leur diffusion. (Pièce n°92)

Pire, le géant suisse des structurés avouait lui-même cette interdiction de vente : « L’impossibilité dans laquelle se trouvait la société LEONTEQ de commercialiser en France les produits structurés en cause résulte de ses propres documents contractuels : « Restriction de vente : ce produit peut être offert en Suisse ou à partir de la Suisse uniquement à des investisseurs qualifiés au sens de la loi fédérale Suisse sur les placements collectifs de capitaux (« LPCC »), dans sa version actualisée ».

Ainsi « Seule une campagne marketing adaptée à un univers d’investisseur précis et qualifié peut être utilisée », ce qui n’était pas le cas des clients plumés par ses structurés toxiques.

Ce n’est pas la première fois que Leonteq contourne les réglementations françaises pour vendre ses placements en tentant de faire croire à des sollicitations de clients professionnels avertis qui ne le sont pas. https://deontofi.com/produits-structures-emtn-leonteq-cln-sanction-amf/

Sur la mauvaise foi de LEONTEQ et la réalité de sa gestion

Non seulement les produits structurés de Leonteq étaient interdits en France, mais en plus, Leonteq s’est comporté comme un gérant, sans aucun agrément l’y autorisant, pour laminer l’épargne de ses victimes, en multipliant des souscriptions-reventes de structurés Leonteq perdants, pour leur compte en toute illégalité, comme le révèlent les pièces de ce procès :

« II – 4.1 Les pièces versées par les assureurs démontrent que LEONTEQ était le gestionnaire effectif des contrats en cause »

« La technique utilisée par LEONTEQ et les assureurs a consisté à conseiller les clients d’investir les sommes versées sur leur contrat d’assurance-vie dans des Fonds Interne Dédié « FID » ayant tous et en totalité pour actifs sous-jacents des EMTN structurés par LEONTEQ, explique Maître Nicolas Lecoq-Vallon. Ces « FID » censés être administrés par des sociétés de gestion, comme la société de gestion FUCHS FINANCE, étaient, en réalité, directement gérés par LEONTEQ qui créait ses propres EMTN pour les alimenter ».

Au passage, on note que le gérant de paille (FUCHS) derrière lequel se cachait Leonteq, est un homophone en anglais du verbe « niquer » à la troisième personne du singulier (FUCKS)

Surtout, Leonteq ne recule devant rien pour cacher ses forfaits, allant jusqu’à produire des faux devant les tribunaux. Contrairement à une idée largement télédiffusée qu’on devrait dire au tribunal « rien que la vérité, toute la vérité », il est parfaitement légal de mentir aux juges, comme ils nous l’ont confirmé à l’occasion des procès perdus par le distributeur de produits structurés Hedios contre Deontofi.com.

C’est bien sûr le cas de Leonteq, comme le révèle encore ce procès :

« 4.4. Les affirmations de LEONTEQ sont fausses ou erronées ».

« La société LEONTEQ produit des TS en anglais, qui n’ont pas été remises aux concluants, et qui leur sont inopposables (pièces LEONTEQ n°5 à 24), dénonce l’avocat des victimes. Les Term Sheet produites par les concluants et celles versées par LEONTEQ sont totalement divergentes. (confère pièce n°37 des clients et pièce LEONTEQ n°11). En outre, la société LEONTEQ procède à une traduction libre de ses TS en anglais, qui est totalement contestée par les concluants. Notamment les prétendues définitions du cours de constatation initiale énumérées dans les conclusions LEONTEQ pages 35 et suivants ne semble pas correspondre à la définition en anglais de l’« Initial fixing level » des Terms sheet qu’elle communique :

Par exemple :

Pièce LEONTEQ n°11

A rapprocher de :

CH0359141808 11 « Fixation antérieure : valeur du sous-jacent telle que raisonnablement calculée et déterminée par l’Agent de calcul ».

Conclusions LEONTEQ page 36 

Et pour les besoins du raisonnement, si on se réfère aux traductions contestées, la société LEONTEQ indique que « il apparaît ainsi que pour chaque produit, la définition du cours de constatation initiale ne permettait pas de considérer qu’il s’agissait du cours de bourse « réel » à la date de constatation initiale, mais d’une valeur du sous-jacent observée dans le passé (la définition précisant parfois « fixation antérieure en gras), éventuellement multiplié par un facteur multiplicateur situé entre 1 et 3  (source : Conclusions LEONTEQ du 23 mai 2024, page 36).

LEONTEQ ajoute encore que « le seul produit visé pour lequel la définition du cours du « Cours de constatation initiale » désignait le cours de clôture officiel des sous-jacents à la date de constatation initiale était le produit CH0273396041 » (Conclusions LEONTEQ du 23 mai 2024, page 36) ».

« Autrement dit, si l’on suit son raisonnement et ses traductions (contestées), LEONTEQ prétend que ses contrats l’autorisent à choisir des cours puisés dans le passé de façon totalement arbitraire, résume l’avocat, alors que La mise en avant d’une « valeur observée dans le passé » est de nature à induire en erreur le souscripteur, qu’elle ne peut être choisie arbitrairement, sans aucun critère objectif ; et enfin, que si certains EMTN indiquent parfois « en gras » « fixation antérieure » (ce qui est flou, et donc critiquable en soi), les autres EMTN ne comportant pas cette indication ne peuvent retenir une valeur passée ».

Même les assureurs semblent un peu perdus face aux zig-zag d’explications contradictoires de Leonteq.

« L’assureur NATIXIS LIFE ne conteste pas que le cours de constatation initiale puisse être une valeur passée, en retenant en effet que « la société LEONTEQ a, dans ses conclusions, démontré qu’il n’existait aucune incohérence ou erreur dans la fixation du « cours de constatation initiale » des produits », relève Maître Lecoq-Vallon, et LA MONDIALE EUROPARTNER adopte la même position ».

Par contre, la société CARDIF défend une position totalement contraire, en prétendant que « pour chacun des produits, ce cours initial correspond au cours de bourse des chacune des 5 actions du « panier » à la date d’émission du produit » (source : Conclusions CARDIF du 29.02.202, page 9).

CARDIF ajoute encore que « les cours de constatation initiale correspondent pour chacune des actions du « panier » de chacun des produits à leurs cours de bourse effectif à la date retenue comme référence (dénommée « Date de constatation initiale ») (source : Conclusions CARDIF du 29.02.2024, page 29).

« Or les 4 produits visés par CARDIF (CH0230927516, CH0204549163, CH0266746665, CH0222266857) ne correspondent pas au seul produit dont LEONTEQ (CH0273396041) admet que le cours de constatation initiale correspondrait au cours de bourse effectif », pointe l’avocat des épargnants.

Cardif se serait d’ailleurs avancé un peu à l’aveugle dans ses affirmations bancales, sans avoir pu les vérifier faute de disposer des fameuses « term sheets » des structurés en procès.

« CARDIF reconnaît elle-même qu’elle n’a jamais eu connaissance de la Term Sheet définitive du produit CH0222266857 et donc qu’elle ignore les cours de constatations initiales « fixés ultérieurement » « par LEONTEQ », note l’avocat des souscripteurs (source : Conclusions CARDIF du 29.02.2024, page 30), ce qui ne l’a pas empêché de référencer cet EMTN dans le contrat d’assurance vie de Monsieur S. (anonymisé) sans s’interroger sur les pratiques fautives de LEONTEQ ».

« Il ressort de ses contradictions entre les assureurs et LEONTEQ, et entre les différentes versions de Terms sheet que LEONTEQ a manifestement entretenu la plus grande confusion minée par des contradictions sur les cours de constatation initiale, ce qui aurait dû alerter les Compagnies d’assurance », déplore Maître Nicolas Lecoq-Vallon.

Saga Leonteq, saison 2:

  1. Leonteq pincé en Suisse
  2. FINMA Leonteq, sur la voie de la vérité
  3. La sanction FINMA éclaire les procès français
  4. A / Leonteq et les bancassureurs accusés
  5. B / Pertes abyssales Leonteq en pagaille
  6. C / Leonteq, barattage à tous les étages
  7. Scandales d’assurances-vie Leonteq outre-manche
  8. Leonteq la Suisse cache son jeu
  9. Eramet en embusqué
  10. Leonteq entre sanctions et naufrage
  11. Vider la caisse avant la casse ?

Saga Leonteq, saison 1:

  1. Leonteq flashé par le FT, une saga des structurés
  2. Que lit-on sur Leonteq dans le Financial Times ?
  3. Ernst & Young et les audits serviables
  4. Des structurés perdants de Leonteq (EMTN)
  5. Au cœur de Leonteq, une conformité foutraque
  6. Fraude Leonteq Eramet, l’omerta française brisée
  7. Leonteq et le CLN-Rallye pas nickel d’Eramet
  8. Produits structurés danger : Déontofi alerte la justice !
  9. Maximum 12,62% ? Décrément à la loupe

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