
En France, les épargnants plumés par des produits structurés et pratiques frelatées de Leonteq, connaissent bien sa capacité de résistance à toutes demandes d’indemnisation ou même d’information, liées à leurs pertes aussi calamiteuses que scandaleuses.
Depuis plus de six ans, nous avons connaissances de poursuites contre Leonteq en justice par de nombreux épargnants plumés en France, en plus des procès fleuve contre Leonteq et les fonds de pension britanniques ayant plumé leurs clients anglais.
Les premiers procès lancés en France par des victimes de produits structurés Leonteq dont on a eu connaissance étaient menés par le cabinet d’avocats Lecoq-Vallon & Feron-Poloni, réputé pour ses nombreux combats et victoires judiciaires contre les abus des institutions financières, banques, assureurs-vie et autres marchands de placements scabreux (notamment l’arnaque Hedios DomTomDefisc dont la narration nous a valu des procès bâillons jusqu’en Cassation).
Mais ce ne sont pas les seuls litiges Leonteq connus de la justice. Il y a eu en 2023 ce procès révélé par nos confrères du média d’investigation L’informé, cette fois à cause des Credit Linked Notes, ou CLN de Leonteq, une variante de produits structurés dénaturés, comparables au CLN-Rallye frauduleux fourgués à Eramet.
On connaît également diverses procédures en cours, au nom d’autres victimes de Leonteq, engagées par les avocats Maître Christophe Lèguevaques, à Toulouse, et Maître Guillaume Puig, à Chambéry.
Dans la première affaire, défendue par Maître Christophe Lèguevaques, relative à un EMTN de Leonteq distribué par Cardif (BNP Paribas Assurances) dans ses contrats d’assurance-vie, les deux institutions financières se renvoient la balle en multipliant les procédés dilatoires pour esquiver leurs responsabilités, plaidant d’abord la prescription (Cardif et Leonteq ont perdu sur ce point), ou encore l’estoppel, une argutie de ratiocination juridique pour éconduire les plaignants, en prétextant leurs propres contradictions. Un art dans lequel les bancassureurs et vendeurs de placement sont virtuoses. Résultat, ce procès est enlisé depuis plus de quatre ans, faisant la navette devant les juges de la mise en état, dans l’attente d’un jugement sur le fond.
Dans la seconde affaire, défendue par Maître Guillaume Puig, concernant aussi des produits structurés foireux, EMTN de Leonteq distribués par Cardif (BNP Paribas Assurances), les victimes ont d’abord été baladées dans un labyrinthe procédurier, comme on l’apprend au détour d’un jugement d’incident au sein de leur procès, aussi en cours depuis plus de cinq ans : « Faute de solution amiable, [les victimes] ont saisi le médiateur de l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui, dans sa réponse en date du 18 avril 2018, s’est déclaré incompétent pour la raison que les produits souscrits ont été offerts au public en Suisse, les termsheets afférents n’ayant pas été visés par l’Autorité des marchés financiers, suggérant en outre aux demandeurs de saisir le médiateur de la Fédération Française d’Assurance (FFA), dans la mesure où les produits litigieux ont été proposés dans le cadre d’un contrat d’assurance-vie par le truchement d’un mandataire d’intermédiaire d’assurance », raconte cette ordonnance d’incident du 8 mars 2024.
Au passage, cet élément parmi d’autres, relève la contradiction consternante entre la réalité des plaintes d’épargnants auprès du gendarme boursier sur les produits structurés, et un récent communiqué du 1er avril 2025 (gros poisson qui frétille encore), déclarant « L’ACPR et l’AMF précisent n’avoir reçu aucune plainte par leurs services de relation avec la clientèle au cours des dernières années concernant ces produits ». C’est FAUX : Deontofi.com peut prouver que l’AMF a reçu bien des réclamations de victimes des produits structurés ces dernières années. Pourquoi inventer cette réalité alternative adoucissant leur nocivité, sinon pour plaire au lobby bancaire diffusant ces placements ?
Pire. Alors que l’AMF a été parfaitement informée en détail par un lanceur d’alerte, du rôle joué par le courtier I-Kapital, dans le circuit de blanchiment de commissions offshore sur les produits structurés frelatés étalé par le Financial Times, on apprenait le 13/3/2025 que le secrétaire général du gendarme boursier avait signé un « accord de composition administrative conclu avec la société I-Kapital le 9 décembre 2024 », omettant toute mention de « LEONTEQ ».
On y lit pourtant tous les ingrédients révélés par le FT dans l’affaire Leonteq ID Formation. Défaut d’information des clients.
Absence de lutte anti-blanchiment opérationnelle.
Belle aubaine pour Leonteq, l’omerta persiste. Quant au président du courtier I-Kapital, Yoni Kabalo, il s’en tire à très bon compte, soulignant que cet accord « ne constitue ni une reconnaissance de culpabilité, ni une sanction« . Mieux, comme en Suisse, l’AMF laisse à I-Kapital le choix d’un auditeur serviable [comme Ernst & Young pour Leonteq et Wirecard ?], chargé de pondre un rapport « sur le respect des règles de bonne conduite en matière d’information de la clientèle sur la rémunération perçue par IK ainsi que sur les coûts et frais associés aux souscriptions conseillées ainsi que sur le caractère complet et opérationnel de son dispositif LCB/FT« . Ce rapport devra « rendre compte avec exhaustivité de la mise en oeuvre de l’ensemble des engagements d’IK mentionnés ci-dessus et être adressé à l’AMF dans les quatre mois suivant l’homologation du présent accord« . A défaut d’y croire, on se marre.
Alors que LEONTEQ passait entre les mailles de ce filet sans le moindre entre-filet, les procès de ses victimes sont paralysés par ses obstructions.
« Nous avons finalement plaidé le fond de cette affaire à l’audience du 31 janvier dernier, devant la 9ème Chambre 2ème Section du Tribunal Judiciaire de Paris, qui doit rendre son jugement le 11 avril », expliquait Maître Guillaume Puig, l’avocat de ces épargnants réclamant 3,2 millions d’euros d’indemnisation à Leonteq et ses distributeurs, dont 1,2 million pour leurs pertes en capital, et 2 millions correspondant aux gains promis par ces placements truqués, des gains « revendiqués après constatation des cours à l’échéance, et dus par Leonteq s’il avait appliqué les vrais cours initiaux des actions sous-jacentes de ses EMTN« , précise l’avocat.
Pas de chance, « le délibéré du Tribunal judiciaire de Paris, initialement prévu au 11 avril 2025 dans l’affaire de mes clients opposés à Leonteq, a été prorogé au 23 mai prochain », nous précisait récemment Maître Guillaume Puig.
Leonteq étant coutumier de ces procédés dilatoires, le cabinet Lecoq-Vallon & Feron-Poloni essuie aussi les esquives de Leonteq et ses distributeurs dans un procès marathon, embourbé depuis près de 6 ans, portant sur des UC LEONTEQ truquées en assurance-vie vendues entre 2015 et 2019.
Alors que ce dernier procès s’éternise, comme les autres, les détails exposés par la sanction de la FINMA apporteraient aux juges français des éléments précieux, confirmant officiellement les pratiques frauduleuses de Leonteq ayant concouru au préjudice allégué par ses victimes françaises.
« La FINMA vient de confirmer ce que des lanceurs d’alerte ont affirmé dès 2021 : Leonteq a été impliqué dans des transactions illégales depuis 2018 au moins », renchérit un de ces lanceurs d’alerte, pour rappeler l’importance des révélations étayant cette sanction FINMA.
Mais pour cela, il faudrait d’abord que la FINMA dispose un jour des informations qu’elle prétend obtenir de Leonteq, ou qu’elle a peut-être obtenues dans le cadre de son enquête. Et surtout, il faudrait que l’autorité suisse se préoccupe davantage des victimes de Leonteq, en partageant la base factuelle de ses découvertes (tardives) avec nos justiciables et tribunaux français, ce qui ne semble pas gagné.
Pour comprendre comment Leonteq embrouille ses clients, et même leurs conseillers, voire les assureurs-vie s’étant fourvoyé à référencer Leonteq dans leurs contrats, soulevons le capot de ce dernier procès fleuve réservant bien des surprises.
Ce procès lui-même étant un labyrinthe tentaculaire, Deontofi résume ses enjeux pour les épargnants en trois points facilitant une lecture plus digeste :
- A / Leonteq et les bancassureurs accusés
- B / Pertes abyssales Leonteq en pagaille
- C / Leonteq, barattage à tous les étages
Saga Leonteq, saison 2:
- Leonteq pincé en Suisse
- FINMA Leonteq, sur la voie de la vérité
- Sanction FINMA éclaire procès Leonteq
- A / Leonteq et les bancassureurs accusés
- B / Pertes abyssales Leonteq en pagaille
- C / Leonteq, barattage à tous les étages
- Scandales d’assurances-vie Leonteq outre-manche
- Leonteq la Suisse cache son jeu
- Eramet embusqué, Leonteq esquivé
- Leonteq entre sanctions et naufrage
- Vider la caisse avant la casse ?
Saga Leonteq, saison 1:
- Leonteq flashé par le FT, une saga des structurés
- Que lit-on sur Leonteq dans le Financial Times ?
- Ernst & Young et les audits serviables
- Des structurés perdants de Leonteq (EMTN)
- Au cœur de Leonteq, une conformité foutraque
- Fraude Leonteq Eramet, l’omerta française brisée
- Leonteq et le CLN-Rallye pas nickel d’Eramet
- Produits structurés danger : Déontofi alerte la justice !
- Maximum 12,62% ? Décrément à la loupe