Quel est le poids des frais ? L’impact des frais sur les gains ? A quoi servent les frais des placements ? Comment réduire les frais ? Gilles Pouzin de Deontofi.com répond sur BFM Business TV
Trop de frais ? Savez-vous au moins combien vous en payez ? Soucieux d’éclairer le débat et l’information des épargnants sur ce sujet, Deontofi.com était l’invité de l’émission Intégrale Placements sur BFM Business TV le 20 juin 2017 pour évoquer ce sujet à travers des questions d’auditeurs, en complément de son enquête récemment réalisée pour le journal Le Monde, en ligne ici.
– Quel est le poids des frais sur les placements ? Et leur impact sur leur rentabilité ?
On ne les voit pas ou peu, les frais sont pourtant une caractéristique essentielle des placements, et un rouage clé de l’industrie financière. Chaque année, les épargnants payent plus de 18 milliards d’euros de frais sur leurs placements, souvent sans le savoir. Les frais prélevés sur les Sicav et fonds d’investissements auraient atteint 6,5 milliards d’euros en France en 2016, selon la société d’analyse Morningstar, tandis que ceux prélevés sur les contrats d’assurance vie approchaient 12 milliards d’euros, avec une moyenne d’environ 0,75% de frais prélevés sur les 1600 milliards d’euros placés dans ces contrats.
Beaucoup d’investisseurs sous-estiment l’impact des frais, selon le gendarme boursier (AMF)
« Les frais des placements financiers sont insuffisamment portés à la connaissance des clients », constate année après année l’Autorité des marchés financiers (AMF), lors de ses visites mystères en agences. A la différence des frais bancaires prélevés sur les comptes des clients, qui font l’objet d’un récapitulatif annuel obligatoire depuis 2009, les frais sur l’épargne sont quasi-invisibles. Quand on souscrit à une Sicav ou une assurance vie, les frais prélevés sont obligatoirement indiqués dans les documents d’information obligatoires, mais les conseillers préfèrent mettre l’accent sur des aspects plus nobles. Résultat, « beaucoup d’investisseurs sous-estiment l’impact des frais et ne disposent donc pas d’une information complète sur la pertinence de leurs placements », note l’AMF.
Près de 2% de l’épargne sont prélevés chaque année sur les Sicav et fonds investis en actions, destinés aux particuliers, contre 1,75% en 1999, sans garantir de meilleurs résultats. « Des frais plus élevés ne sont pas synonymes de meilleurs rendements », rappelle le gendarme boursier. Au contraire, le poids des frais explique en grande partie le manque à gagner de la plupart des fonds d’actions françaises par rapport à l’indice CAC 40 en incluant les dividendes.
– A qui vont les frais ? Pour quels services ?
Mais sans frais, pas de placements, ni de conseils, ni de prestataires et contrôleurs veillant au respect des règles, ni publicité et sponsoring pour promouvoir ces placements. Car les frais sont le nerf de la guerre. Qu’il s’agisse d’agences bancaires, de conseillers en gestion de patrimoine indépendants (CGP), ou d’intermédiaires sur Internet, les distributeurs sont rémunérés par une commission récupérée sur les placements qu’ils proposent.
Les frais sont une caractéristique essentielle des placements et le nerf de la guerre. Sans eux, pas de placements, ni conseils, ni contrôles.
Sur le contrat d’assurance vie Fortuneo Vie, par exemple, les clients sont informés des frais de gestion des fonds proposés en unités de compte et de la part rétrocédée à l’assureur. Par exemple sur le fonds Echiquier Global, qui vise une diversification mondiale avec des risques maîtrisés, les frais annuels sont annoncés à 2,39%, dont 40% rétrocédés à Fortuneo (0,9568%). En plus de ces 2,39%, le souscripteur se voit prélever chaque année 0,75% de frais sur son contrat Fortuneo Vie en unités de compte.
Il a été envisagé d’interdire ces rétrocessions, lors de la révision de la directive sur les marchés d’instruments financiers (MIF2), en vigueur depuis janvier 2017, mais cette piste a été abandonnée. « Les conseillers en investissements financiers doivent démontrer que la rétrocession améliore la qualité de service aux clients. C’est bien grâce aux rétrocessions qu’ils peuvent faire le travail comparatif sur les fonds et l’analyse du portefeuille des clients pour les conseiller », explique Benoist Lombard, président de la Chambre nationale des conseillers en gestion de patrimoine (CNCGP).
– Comment réduire les frais sur ses placements boursiers ?
Comment réduire les frais sur ses placements financiers ? Les réponses concrètes et pratiques de Deontofi.com
Pour payer moins de frais, on peut choisir les placements les moins coûteux à qualités comparables. En moyenne, les fonds « indiciels » qui répliquent la composition des indices boursiers (comme l’indice CAC40 des actions françaises ou l’indice S&P500 des valeurs américaines), prélèvent 0,57% de commissions par an, soit 3,5 fois moins que les fonds d’actions pour les particuliers classiques. Mais là encore, les écarts sont énormes. « Le fonds indiciel ING Direct CAC 40 prélève 1,71% de frais, ce qui explique son score de seulement +5% entre 2005 et 2015, par rapport à la performance de +41% de l’indice CAC 40 avec dividendes réinvestis », explique Guillaume Prache, directeur de la Fédération européenne des épargnants, Better Finance. Avec 0,25% de frais, le fonds indiciel Lyxor CAC 40 est plus performant. Ce type de fonds n’est proposé que dans quelques contrats d’assurance vie, comme celui de Boursorama ou le contrat Darjeeling du courtier Placement Direct. On peut aussi l’acheter directement en Bourse, mais cela engendre des frais de courtage sur les transactions et d’éventuels frais de tenue de compte annuels. Esquiver les frais n’est pas simple.