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Services du Médiateur de l’Autorité des marchés financiers (AMF), 4 Place de la Bourse, à Paris (photo © GPouzin)

On a moins de motifs de se plaindre des intermédiaires en placements quand on gagne de l’argent. C’est un des constats tirés par la médiatrice de l’Autorité des marchés financiers (AMF), Marielle Cohen-Branche, dans son rapport annuel 2019 publié ce matin.

« La circonstance que les bourses européennes ont fait un bond de 26 % (indice EuroSTOXX50), et enregistré ainsi leur meilleure performance depuis 1999, n’est pas étrangère à la baisse de 11 % du nombre des dossiers reçus en médiation en 2019 (1295 contre 1438). Il n’est pas étonnant, dès lors, que les griefs relatifs aux mauvaises informations et conseils ne représentent plus qu’un quart des demandes au lieu d’un tiers environ », explique la médiatrice dans son rapport.

La baisse des réclamations liées aux mauvais conseils serait donc particulièrement sensible en période de hausses des cours, car les épargnants ont moins l’occasion de découvrir qu’on leur a conseillé des placements inadaptés à leur situation leur ayant causé un préjudice.

En passant d’environ un tiers des demandes médiation en 2018 à un quart en 2019, la baisse des réclamations liées aux mauvaises informations et conseils aurait ainsi chuté d’environ 33%.

Deux fois moins de réclamations irrecevables par Internet

D’une façon générale, les épargnants sont aussi mieux orientés lors du dépôt de leurs réclamations, ce qui réduit fortement les demandes de médiation en dehors du champ de compétence de l’Autorité des marchés financiers. En effet, la répartition des rôles entre les différents médiateurs est un vrai labyrinthe pour le grand public. Comment savoir qu’une réclamation sur un fonds d’investissement relève de l’AMF, mais qu’elle sort de son champ de compétence, et qu’il faut s’adresser au médiateur de l’assurance, quand ce même fonds d’investissement est souscrit dans le cadre d’un contrat d’assurance-vie multisupports ?

« Il est en effet très difficile pour les épargnants de distinguer ce qui relève d’un placement bancaire (épargne réglementée, compte à terme) ou d’assurance (contrat d’assurance vie en euros ou en unités de compte) et ce qui constitue un placement financier (bourse, OPC, tracker, SCPI, FCPI, FIA, PEA, etc) », détaille la médiatrice de l’AMF.

La baisse des réclamations irrecevables est donc un soulagement, comme l’explique le service de médiation dans son rapport : « cette dernière évolution résulte de la mise en place courant 2018 d’un filtrage par une série de questions pour les saisines par formulaire sur internet. Ainsi les dossiers reçus par ce canal et hors du champ de compétence du médiateur de l’AMF ont baissé de 46 % en 2017 à 27 % en 2018 et 22 % en 2019 ».

Les questions posées aux épargnants à la saisie, sur le site internet de l’AMF, du formulaire de demande de médiation, éclairées par des exemples concrets, sont les suivantes : votre litige est de quel ordre (bancaire, assurance vie, fiscal, crédit, financier) ? Votre litige a-t-il été examiné par un autre médiateur ? Par un tribunal ? Avez-vous déposé plainte ? Avez-vous formulé une réclamation écrite préalable auprès de l’établissement concerné ? À quelle date ?

En deux ans, grâce à ce questionnaire, la proportion de réclamations irrecevables reçues par Internet a été divisée par plus de deux ! De plus, les épargnants dont les réclamations ne sont pas recevables sont mieux orientés vers les guichets compétents en fonction de leurs réponses.

Deux tiers des réclamations irrecevables du ressort des banques

Toutes réclamations confondues, le nombre de saisines irrecevables n’a pourtant baissé que de 13% l’an dernier, passant de 631 demandes irrecevables reçues en 2018 à 551 en 2019. Sur ce demi-millier de réclamations hors compétence de l’AMF, deux tiers relevaient du secteur bancaire, et une sur six du secteur de l’assurance.

Certes, des progrès restent à faire, mais les habitudes ont la vie dure, car trop peu d’épargnants mécontents ont recours à Internet pour saisir le médiateur.

« Pour que cette tendance progresse encore, il faudrait que les épargnants utilisent davantage le formulaire disponible sur le site de l’AMF pour saisir la Médiation, explique le rapport. Ce canal de saisine ne représente que 27 % des demandes. Malheureusement, les épargnants continuent très majoritairement de saisir la Médiation par courrier postal (73 %) et ces proportions n’évoluent guère d’une année à l’autre. »

Certains renoncent peut-être à déposer leurs réclamations sur Internet parce qu’ils n’ont pas d’ordinateur, ou par manque de moyens pour scanner leurs documents et compléter leur dossier.

En observant le comportement des internautes sur son site, le service de médiation de l’AMF a ainsi remarqué « que seuls 11 % des visiteurs déclarent avoir satisfait aux différentes conditions de recevabilité et que seuls 50 % de ces demandeurs potentiels envoient effectivement le formulaire et passent ainsi à l’acte », note le rapport.

Si le filtrage effectué par Internet est plus efficace pour éviter les saisines irrecevables, il évite aussi aux épargnants déçus de perdre leur temps à constituer de fastidieux dossiers qui n’auraient aucune chance d’aboutir.

Peu de déceptions malgré une minorité de gains de cause

Avec la baisse des réclamations, le nombre de litiges résolus par la médiation de l’AMF a aussi baissé de 14% l’an dernier, passant de 523 propositions de solutions amiables en 2018 à 451 en 2019. Recourir à la médiation est un bon moyen de vérifier si l’on est dans ses droits quand on demande réparation d’un préjudice. Quand les intermédiaires financiers sont en tort, la médiatrice de l’AMF parvient généralement à obtenir une proposition de réparation amiable. Elle parvient même à obtenir un dédommagement « en équité », dans des situations où le bon sens et la bonne foi doivent l’emporter bien qu’une application minimaliste du droit ne plaide pas pour le consommateur. Certes, quelques rares établissements refusent systématiquement toute négociation, comme le pointe la médiatrice à propos de Nestadio Capital, une société de gestion de Fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) et Fonds d’investissement de proximité (FIP).

Dans l’ensemble, quand la médiation est favorable aux épargnants, la proposition de règlement amiable recommandée par l’AMF est acceptée dans 97% des cas par les protagonistes du litige, épargnants et professionnels. Les consommateurs n’ont cependant gain de cause que dans une minorité de cas. En 2019, seuls 41% des litiges ont été résolus en faveur du demandeur. Dans 59% des cas, la médiatrice de l’AMF n’a pu proposer un règlement en faveur des épargnants, car le droit n’était pas de leur côté. Dans bien des situations, les consommateurs comprennent mal les règles et les raisons de leur préjudice, sans qu’ils aient pour autant été lésés, ou que la responsabilité des intermédiaires soit en cause.

« Un taux de recommandation favorable élevé ne peut être un objectif en soi puisque le sens de la recommandation dépend des caractéristiques intrinsèques du dossier, c’est-à-dire du bien fondé de la demande », rappelle la médiatrice dans son rapport.

Dans les cas où la médiation n’est pas favorable aux épargnants, la médiatrice doit effectuer un gros travail de pédagogie pour leur expliquer les raisons de sa recommandation. Chaque mois, elle décortique aussi un cas de médiation anonymisé dans le Journal de bord du médiateur, afin d’aider les internautes à comprendre les enjeux de ses décisions. Globalement, ces explications permettent aux épargnants de comprendre et d’accepter les recommandations de la médiatrice, même quand elles ne sont pas favorables. Résultat, « seulement 4 % des propositions défavorables aux épargnants sont contestées par ces derniers », précise le rapport.

Quelle que soit l’issue des réclamations, la médiation de l’AMF permet en tout cas d’y voir plus clair, de mieux comprendre ses droits, et d’avoir une solution acceptable, même quand elle n’est pas toujours favorable.

Pour déposer une réclamation en ligne auprès du médiateur de l’AMF, suivez ce lien.

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