L’ampleur de l’arnaque reposait sur des commissions alléchantes pour inciter les conseillers financiers à convaincre les épargnants d’engloutir leurs économies dans l’escroquerie Dom Tom Défiscalisation.

4ème épisode du procès de Dom Tom Défiscalisation, la plus grosse escroquerie à l’investissement défiscalisé en panneaux solaires Girardin industriel. Tout le sommaire des articles de Deontofi.com sur cette arnaque photovoltaïque ici.

12h30, l’audience reprend. On ramène Jacques Sordes, grand malade s’il en est, en fauteuil roulant dans le box des accusés. Monsieur Peimane Ghaleh-Marzban, président du tribunal correctionnel, déroule un rapide inventaire de menues possessions acquises par l’escroc avec l’argent volé aux épargnants, qui ont pu être récupérées.

– Ont été saisies : une BMW X6, deux villas à Schoelcher et une villa au Vauclin [ndlr : deux stations balnéaires chic et bourgeoises de la Martinique], 780 000 euros saisis sur un compte bancaire, un autre compte Haigel d’un million 53 000 euros, 580 000 euros sur le compte de l’EURL Sordes, et en dernier lieu 630 000 euros de la société Radec Ltd. L’instruction a permis d’établir que sur les 56 millions collectés, 14% ont été utilisés pour régler des dépenses personnelles, 13 millions, soit 23%, pour la création de sociétés luxembourgeoises de compléments alimentaires et cosmétiques, 33% pour des investissements financiers et divers placements. Au total, 70% de la collecte a été utilisée à des fins autres que l’investissement en loi Girardin, 15% pour rémunérer les réseaux de vente et conseillers en gestion de patrimoine (CGP) dont les commissions devaient être de 6% de la collecte. Vos observations ?

– Sur le sort des sommes, vous venez de le dire. Je ne comprends pas la question.

– Nous évaluons la gravité objective des faits concernés, de l’escroquerie telle que présentée par l’accusation, qui apparaît d’une certaine ampleur.

– En refaisant l’histoire des années après, j’assume d’avoir dépensé 8 millions à des fins personnelles, entame Jacques Sordes, en préambule d’un enfumage dont il raffole. Comme le processus d’installation est extrêmement long, et que la loi nous demandait d’avoir acheté le matériel à 100% avant la fin de l’année, ce que nous avons fait, le rapport le confirme ; tout cet argent là, techniquement, ne servait à rien. Est-ce que je le laisse là ou le fait travailler en bon père de famille ? Je ne parle pas des 8 millions de dépenses personnelles. En revanche, j’ai la proposition de M. Gamina, d’une affaire sans risque, bénéficiaire quand je suis arrivé. Je me disais qu’avec les bénéfices je pourrai financer les centrales. Les grèves d’EDF ne me regardent pas mais elles perturbent les services qui recevaient les demandes. J’ai fait ces investissements pour protéger les investisseurs. Certains étaient des escroqueries, comme à Hong Kong. Mais il n’y a pas de zone grise ! Au centime près on sait où est passé l’argent. J’ai parlé de la voiture achetée à la maman de Michelle, que je vénère, elle a presque remplacé ma mère, ça fait partie des sommes que je n’aurais pas dû dépenser. J’aurais dû attendre un an de plus que les centrales soient installées. J’ai 17 petits-enfants, 5 arrière-petits-enfants, à cause de ça j’ai vécu l’enfer : quatre ans en prison sur toutes ces années.

– On va aborder les questions de personnalité et de situation personnelle bientôt, recentre le président. Et l’entreprise de cosmétiques ?

– Ça me semblait cohérent.

– La conclusion de l’expert dit qu’il n’y a eu aucun raccordement de janvier 2007 à 2010, alors qu’il y doit y avoir une livraison complète et effective du bien dans un département d’Outre-mer et qu’il doit être en mesure d’exploitation effective pour bénéficier de l’avantage fiscal, intervient le procureur.

– Il confirme ce que je dis depuis le début du procès, « idemise » Jacques Sorde.

– Confirmez-vous que le panneau coûte un cinquième ou une faible proportion du coût total ?

– Vous pouvez répéter la question ?

Il répète : – Confirmez-vous que le panneau coûte un cinquième ou une faible proportion du coût total ?

– J’ai remis au tribunal un document où les panneaux représentent 30% de l’investissement sur 50 000 euros, qui mentionne que tout le reste de l’investissement est facturé aux sociétés en participation (SEP).

– Vous facturez aux SEP ? C’est une gymnastique intellectuelle que vous maîtrisez très bien sur  le Girardin, ironise le procureur.

– Sur les 250 000 euros, on collecte un montant inférieur à 40%, dans les 32%.

– Mais vous lui facturez le tout ?

– Oui. Comme Lynx Industries à la charge de l’opération, c’est pourquoi on lui envoie l’argent.

– Quel est le crédit fournisseur ?

– Dès le premier jour. On reçoit environ 32% d’un investissement global, elles ne payent pas le reste, il est financé par le crédit d’impôt…

– Ce n’est pas la question, coupe le procureur.

– C’est sa façon de répondre et je la défendrai, s’interpose l’avocat de Jacques Sordes.

– Le tribunal ne comprend même pas quelle question est posée, tempère le président.

– Sur les centrales montées, quasiment 100% de la partie industrielle neuve défiscalisée est payée par l’investissement. Pour les centrales pas montées, nous avons stocké les panneaux dans des hangars en Martinique.

– Pensez-vous que la loi Girardin permette une telle proportion de services et si peu d’achat de matériel ?

– C’est la raison pour laquelle la loi a changé, on pourrait l’appeler la loi Sordes, suggère le mégalomane. Il y avait un trou dans la loi, ce que les Américains appellent un « loophole », croit-il savoir.

– Pourquoi avez-vous déposé des pièces à l’encontre d’une mesure de confiscation ? interroge le procureur. (….  l’accusé faisant tourner la discussion en rond, nous abrégeons cette partie technique du débat).

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