Les critiques et réactions des activistes ont mis des bâtons dans les roues au projet franco-chinois promu par le président du Club Med qui avait le feu vert du gendarme boursier. En soulignant le conflit d’intérêt des dirigeants et en dénonçant la valorisation insuffisante de l’offre, ils ont fait monter les enchères dans l’intérêt des petits actionnaires du groupe de loisirs. Voici le calendrier, remis à jour régulièrement, de cette bataille boursière qui n’en finit pas.

Les gagnants de la bataille boursière : au moins six banques, trois cabinets d'audit, un consultant en stratégie, trois conseils en communication et deux avocats se sont penchés sur le dossier.

Les gagnants de la bataille boursière : au moins six banques, trois cabinets d’audit, un consultant en stratégie, trois conseils en communication et deux avocats se sont penchés sur le dossier.

27 mai 2013 : Associés dans Gaillon Invest, le Chinois Fosun et la société de capital risque Axa Private Equity (rebaptisée Ardian), qui détiennent déjà 18,4 % du capital du Club Med, annoncent leur intention de lancer une OPA à 17 euros par action et 19,23 euros (coupon attaché) par Océane, sous condition de récupérer au moins 50 % du capital du Club Med. Il s’agit d’accélérer le développement à l’international du Club.

30 Mai 2013 : le conseil ‘administration du Club Med crée en son sein un comité en charge des tâches liées à l’OPA. Il est composé d’administrateurs indépendants et présidé par Georges Pauget (ex-DG de Crédit Agricole SA). Le conseil nomme également le cabinet Accuracy, représenté par Bruno Husson et Henri Philippe, en qualité d’expert indépendant.

Juin 2013 : Henri Giscard d’Estaing, PDG du Club Med, ne ménage pas ses efforts pour convaincre journalistes et actionnaires du bien fondé de l’OPA. Il s’engage d’autant plus volontiers à soutenir Ardian et Fosun qu’il est, avec son directeur financier, partie prenante à l’opération via une future participation à Gaillon Invest. Il invite les actionnaires du Club Med à vendre des actions qu’il s’apprête ainsi à leur racheter.

21 juin 2013 : à 17 euros, l’OPA suscite les critiques de Colette Neuville. La présidente de l’Association de défense des actionnaires minoritaires (Adam) est mandatée par la société de gestion Moneta AM. Elle adresse un courrier au président de l’Autorité des marchés financiers, Gérard Rameix, pour exposer les raisons pour lesquelles, le projet d’offre lui paraît inacceptable. Elle demande à Gérard Rameix de ne pas donner son feu vert.

26 juin 2013 : Gaillon Invest relève le prix à 17,50 euros par action et à 19,79 euros par Oceane et dépose son offre.

16 juillet 2013 : l’AMF donne son feu vert à l’offre de Gaillon Invest.

24 et 26 juillet 2013 : Catherine Berjal, créatrice du fonds CIAM ( Charity Investment Asset Management) et Colette Neuville, présidente de l’Adam, contestent officiellement la décision du gendarme des marchés. Les deux activistes déposent un recours en annulation de la décision de conformité de l’AMF devant la Cour d’appel. L’Adam obtient que le recours soit suspensif et par conséquent la clôture de l’OPA de Gaillon Invest ne pourra avoir lieu que 8 jours minimum après l’arrêt de la cour d’appel.

27 février 2014 : Audience des plaidoiries devant la cour d’appel de Paris.

29 avril 2014 : la cour déclare les recours irrecevables. L’OPA est donc rouverte jusqu’au 23 mai au même prix de 17,50 euros par action valorisant Club Med un peu au dessus de 550 millions d’euros ceci, alors que l’action fait toujours l’objet d’achats en Bourse aux alentours de 18,50 euros.

30 avril 2014 : en assemblée générale, Henri Giscard d’Estaing, le président du Club Med, est hué par ses actionnaires lorsqu’il insiste sur « les conditions très intéressantes » de l’opération Gaillon Invest. Il ne répond pas clairement aux questions qui lui sont posées pour savoir si les engagements à apporter aux côtés de Gaillon Invest, émanant d’autres actionnaires et évoqués dans la note d’opération, sont irrévocables.

19 mai 2014 : plusieurs fonds ont consolidé leurs positions en achetant en Bourse au-dessus du prix d’OPA. C’est le cas et du fonds Strategic Holdings, de l’homme d’affaires italien Andrea Bonomi, qui accapare 10% du capital. Par ailleurs, le holding Edizione de la famille Benetton, propriétaire d’environ 2% de Club Med, qu’il s’était plus ou moins engagé à vendre à Gaillon Invest, fait savoir qu’il n’apportera pas ses titres à l’OPA à 17,50 euros.

23 mai 2014 : Gaillon Invest, qui estimait l’engagement d’Edizione d’apporter les titres, comme irrévocable, l’assigne en référé. Gaillion Invest est déboute par le tribunal, jugeant qu’Edizione n’a jamais qualifié sa décision d’irrévocable dans la note d’information de l’OPA. Dans la foulée, l’AMF va demander à Bonomi de déclarer ses intentions par une procédure dite « put up or shut up » (qu’on peut traduire par « va-y ou ferme-la »!). Soit il se décide à lancer une OPA, soit il renonce et ne peut plus revenir sur sa décision dans les 6 mois.

Juin 2014 : Andrea Bonomi confirme ses visées sur le Club Med. Une contre-offre de l’italien est évoquée. L’AMF lui accorde un délai jusqu’au 30 juin 2014 pour se décider. Bonomi met ce temps à profit pour demander au Club Med les mêmes informations que celles dont dispose Gaillon Invest. Il rencontrera le représentant de Fosun pour envisager une alliance avec le Chinois mais ne fera pas preuve de diplomatie et sera éconduit. Henri Giscard d’Estaing annonce qu’il ne compte pas rester si Bonomi s’empare du Club Med. Dans les faits, l’offre est considérée comme hostile. Gaillon Invest reconfirmera qu’il n’a pas l’intention de relever son prix d’offre au delà de 17,50 euros.

La surenchère officielle du 30 juin 2014 valorise le Club Med 227 millions d'euros plus cher que l'OPA amicale promue par les dirigeants.

La surenchère officielle du 30 juin 2014 valorise le Club Med 227 millions d’euros de plus que l’OPA amicale promue par les dirigeants.

30 juin 2014 : Andrea Bonomi annonce une contre-offre à 21 euros par action Club Med et 22,41 euros par océane, avec un seuil de caducité à 50 %. C’est Global Resorts, une des sociétés de sa holding Investindustrial, qui s’engage aux côtés de professionnels du tourisme. Les choses se compliquent pour l’AMF qui doit fixer les calendriers respectifs des deux offres concurrentes. Celle de l’Italien valorise le Club Med à 790 millions d’euros, au lieu de 563 millions pour le Gallion Invest.

5 juillet 2014 : le comité adhoc du conseil d’administration du Club Med va nommer deux nouveaux experts sur l’offre de Bonomi : Associés en Finance, en qualité d’expert indépendant pour analyser le prix proposé, et Roland Berger, en qualité de conseil stratégique.

25 juillet 2014 : le conseil d’administration du Club Med rend son avis. Avec quelques réserves, il recommande aux actionnaires d’apporter leurs titres à la contre-offre d’Andrea Bonomi. Toutefois, Roland Berger n’aura pas réussi à y voir clair dans la stratégie de Bonomi. S’il l’emporte, l’Italien veut confier la présidence du Club Med à l’ancien président et fils de son fondateur, Gilbert Trigano. A part ce détail, il reste flou sur ses intentions.

14 août 2014 : Gaillon Invest retire son offre à 17,50 euros.

18 août 2014 : ouverture officielle de l’offre de Global Resorts, qui se terminera le 19 septembre. Les opérations d’apport à l’OPA de Gaillon sont annulées. Les actionnaires retrouvent la liberté d’apporter leurs titres à l’offre la plus élevée.

12 septembre : le conglomérat chinois Fosun se décide à surenchérir sur Bonomi, via un nouveau holding Gaillion Invest II. Il propose 22 euros par action et 23,23 euros par Oceane, ce qui valorise le Club Med à 839 millions d’euros. Fosun apporte 85 % du financement aux côtés d’Ardian (5 %), des managers du Club Med et de U-Tour, un voyagiste chinois. Le conseil du Club Med nomme un nouvel expert indépendant, Bellot Mullenbach & Associés. L’offre de Bonomi est prorogée.

16 septembre : en présence d’une vingtaine de personnes, le Comité d’entreprise du Club Med rencontre le président et le directeur général de Fosun qui leur présentent l’offre Gaillon II et répondent aux questions

6 octobre : Le comité d’entreprise, consulté en vertu de la nouvelle Loi dite « Florange » (en réaction à la fermeture de ce site par son actionnaire Mittal), rend un avis négatif sur l’offre chinoise et la déclare inamicale. Andrea Bonomi continue à faire pression. Il a rallié le syndicat des cadres Unsa du Club Med à sa cause, et écrit aux administrateurs pour leur expliquer que seule son offre garantie le maintien des activités centrales en France. Ce même jour, le conseil d’administration rend son avis favorable sur l’offre chinoise Gaillon Invest II examinée par son comité d’administrateurs indépendants.

16 octobre 2014 : l’offre publique d’achat de Gaillon Invest II et Fidelidade obtient le feu vert de l’AMF. De son côté, le Comité européen de dialogue social (CEDS) du Club Med, élargi à l’ensemble des organisations syndicales de sa zone Europe-Afrique, que la loi Florange ne prévoit pas de consulter, se dit inquiet  et rejette les deux offres de Fosun et de Bonomi.

17 octobre : l’OPA chinoise de Gaillon Invest II et Fidelidade à 22 euros par action est déclarée ouverte. Deux offres courent en parallèle, celle-ci et celle de Global Resorts à 21 euros par action présentée par Andrea Bonomi. Elles se termineront ensemble le 20 novembre, sauf nouvelle surenchère qui devra être connue avant le 13 novembre.

11 novembre : Global Resorts ( Bonomi) surenchérit sur Gaillon Invest II et propose 23 euros sans mentionner son association avec KKR.

13 novembre : L’AMF prolonge encore une fois le calendrier de l’OPA et donne jusqu’au 1er décembre 18h à Gaillon Invest II pour surenchérir sur l’offre de Global Resorts à 23 euros. L’AMF considère que Global Resorts ne dépose pas une nouvelle offre mais qu’il s’agit d’une simple surenchère.

1er décembre 2014 : Le conglomérat chinois composé de Fosun et ses alliés relèvent leur offre sur le Club Méditerranée à 23,50 euros par action en s’alliant au Brésilien Nelson Tanure qui devrait prendre jusqu’à 20% du projet Gaillon Invest II.

5 décembre : Alors que le PDG du Club Med associé à Fosun recevait à Val Thorens 700 invités venus de 26 pays pour un week-end d’inauguration du village 4 tridents de Val Thorens, Andrea Bonomi (Global Resorts) a relevé son prix d’OPA  à 24 euros. Celui-ci représente une surenchère de 50 centimes sur l’offre de Fosun ( Gaillon Invest II).

L’interminable OPA du Club Med, un feuilleton à suivre sur Deontofi.com :

  1. L’OPA sur le Club Med met la Loi Florange à l’épreuve
  2. L’OPA au rabais sur le Club Med, minée par ses conflits d’intérêts
  3. L’horizon s’éclaircit pour les petits actionnaires du Club Med

2 commentaires

    • Gilles Pouzin, le

      Qu’en pense l’auteur de l’article ou celui du communiqué ? En tous cas c’est une bonne question, donc un vrai sujet sur lequel j’interrogerai mes sources à la première occasion, mais pas à l’ordre du jour à court terme. Merci pour votre suggestion et à bientôt sur Deontofi.com

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