Gérés par des groupes de protection sociale privés (principalement Humanis, Malakoff-Médéric, Reunica, AG2R-La Mondiale, Klesia), les régimes complémentaires Agirc-Arrco sont pénalisés par un défaut de recouvrement des cotisations, dont 2 milliards d’euros ne seraient pas payés chaque année par les employeurs. Les coûts de gestion et la ségrégation des fonds de retraite au sein de ces groupes privés font aussi l’objet de débat.

Les magistrats de la Cour des compte recommandent une meilleure supervision de la gestion des retraites par les groupes privés, pour lutter contre la fraude, réduire les frais et améliorer la sécurité. De gauche à droite : Christian Babusiaux, Antoine Durrleman, Didier Migaud, Henri Paul, Vincent Richard. (photo © GPouzin)

Les magistrats de la Cour des compte recommandent une meilleure supervision de la gestion des retraites par les groupes privés, pour lutter contre la fraude, réduire les frais et améliorer la sécurité. De gauche à droite : Christian Babusiaux, Antoine Durrleman, Didier Migaud, Henri Paul, Vincent Richard. (photo © GPouzin)

La gestion des régimes de retraite obligatoires des salariés par des groupes privés entraîne une autre faiblesse : ils échappent à certains dispositifs de contrôle publics.

2 milliards de cotisations impayées chaque année par des employeurs indélicats

La Cour des comptes rappelle dans son rapport que les fraudes ou erreurs d’employeurs indélicats priveraient chaque année les régimes Agirc et Arrco de plus de 2 milliards d’euros de cotisations non recouvrées, selon une étude de l’Acoss (l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui pilote les Urssaf). Une loi a été votée en 2007 pour y remédier, en confiant le contrôle des cotisations Agirc-Arrco à l’Urssaf, mais, bizarrement « ces dispositions n’ont jamais été mises en œuvre, faute de la parution depuis 7 ans du décret d’application de la loi de 2007 », constatent les magistrats en soulignant que « cet attentisme est très anormal et il est préjudiciable tant aux régimes complémentaires qu’aux assurés qui ne se voient pas reconnaître l’intégralité de leurs droits ».

Il arrive en effet que des salariés croient acquérir des points de retraite inscrits sur leurs bulletins de salaire, jusqu’à ce qu’ils découvrent que leur entreprise, disparue depuis des lustres, n’avait pas payé les cotisations indiquées aux caisses de retraite. Sur ce point, la recommandation d’un meilleur contrôle du paiement des cotisations va dans le sens des travaux confiés récemment par le premier ministre Manuel Valls au Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFI-PS), pour étudier la centralisation des cotisations de retraite au niveau de l’Acoss et des Urssaf.

Si les cotisations de retraite doivent être mieux contrôlées, la Cour des comptes estime que c’est aussi le cas des groupes qui les gèrent. Ces fameux groupes de protection sociale (GPS) se sont hissés au rang de géants de l’assurance plutôt performants, en consolidant le réseau des caisses de retraite dont ils ont pris le contrôle de fait. Certes, ce n’était pas mieux avant, quand les régimes complémentaires étaient assurés par 250 caisses de retraite à la gestion pas toujours efficace ni forcément honnête.

A force de rapprochements et de fusion, on ne compte plus aujourd’hui que 23 caisses Arrco et 14 caisses Agirc, note la Cour des comptes. Cette source de rationalisation a cependant un côté obscur. Les caisses de retraite « n’ont pas de personnels ni de moyens de fonctionnement en propre », rappellent les magistrats. Elles « appartiennent à des groupes de protection sociale, qui exercent par ailleurs des activités de prévoyance, de complémentaire santé, d’épargne-retraite et plus généralement d’assurances de personnes », note le rapport.

Renégociation en vue des frais de gestion encaissés par les groupes privés

En pratique, ces groupes d’assurance bénéficient d’une dotation de gestion prélevée sur les cotisations de retraite correspondant à la partie de leurs frais correspondant à la gestion des retraites. Or, ces « charges de personnel (y compris informatiques) comptent pour près de 55 % des coûts de gestion [des retraites Agirc-Arrco], soit près d’un milliard d’euros », note le rapport. On comprend bien que la répartition des charges des groupes de protection sociale, entre leurs activités lucratives et la gestion des retraites, fasse l’objet d’intenses tiraillements qui n’ont pas échappé aux sages de la rue Cambon. Quel assureur ne serait pas tenté d’imputer plus de frais à ses activités non-lucratives pour améliorer la rentabilité de ses centres de profits ?

Une réduction des coûts affectés aux caisses de retraite serait souhaitable, selon les sages de la rue Cambon. Alors que les régimes Agirc-Arrco réclament déjà 300 millions d’euros d’économies aux groupes de protection sociale d’ici 2018, « La Cour estime qu’un objectif encore plus ambitieux devrait être fixé. Il permettrait de réaliser, d’ici 2020, 450 millions d’euros d’économies annuelles, se traduisant par une baisse de 25 % des coûts de gestion », recommandent les magistrats pour qui « une telle réduction des frais de gestion représenterait, en cumulé jusqu’en 2030, environ 6 milliards d’euros, soit 4 à 8 % du besoin de financement global des régimes selon le scénario retenu ».

Accessoirement, les sages de la rue Cambon pointent aussi une faille de sécurité pour les retraites, liée au statut privé des groupes qui les gèrent. « Actuellement, les groupes de prestation sociale gèrent leurs réserves globalement, y compris les réserves de retraite Arrco, explique le président de la 6ème chambre de la Cour des comptes, Antoine Durrleman. Que se passerait-il si un de ces groupes était en difficultés ? Est-ce que les réserves des retraites Arrco pourraient combler un passif des activités concurrentielles ? Il y a un problème juridique de propriété, les partenaires sociaux en sont conscients », note le magistrat. Sans contester les avantages procurés par la mutualisation du suivi des retraites au sein des groupes de protection sociale, la Cour des comptes estime que cette organisation « nécessite en revanche de mettre en place les moyens d’une séparation comptable et juridique stricte entre la retraite complémentaire et l’ensemble des autres activités », aujourd’hui pas très claire.

Un commentaire

  1. vourch, le

    bonjour,

    existe-t-il une association de défense des salariés dépendants du régime agirc-arrco ? afin de faire valoir auprès de la cour européenne , les anomalies liées à la gestion des différents groupes de retraites ; et ainsi être défendu et pouvoir bénéficier normalement de sa retraite agirc arrco .
    je vous remercie pour votre aide

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