A l’heure où les débats sur la réduction des inégalités font rage dans bien des domaines, celui sur les écarts de salaires entre hommes et femmes demeure parmi les plus sensibles.
Une récente étude de l’Insee jette un éclairage particulièrement intéressant sur cette question. Voici l’extrait publié par l’Insee ce matin:
Entreprises, enfants : quels rôles dans les inégalités salariales entre femmes et hommes ?
Dans le secteur privé, la plus forte concentration de femmes que d’hommes de mêmes compétences productives dans des entreprises généralement moins rémunératrices compte pour 11 % des inégalités de salaire horaire selon le sexe. Cet effet dû aux écarts de répartition entre femmes et hommes entre entreprises s’amplifie à la naissance des enfants, en particulier à celle du deuxième enfant : il est près de deux fois plus important entre mères et pères qu’entre femmes et hommes sans enfant.
La hausse de l’effet de répartition au cours du cycle de vie familiale est liée à une présence plus forte des mères dans les entreprises proches de leur domicile et offrant un temps de travail plus flexible. Les sorties du marché du travail des mères de jeunes enfants influent aussi sur l’évolution de l’effet de répartition les années suivant la naissance. Concilier vies familiale et professionnelle peut aussi conduire à des contraintes réduisant les opportunités salariales des mères. Les mères changent moins souvent d’employeur que les pères et travaillent plus souvent dans des entreprises où la part de salariés rémunérés au Smic est plus importante. Ces dynamiques de carrières moins favorables s’ajoutent à la baisse de salaire qui suit une naissance pour les mères et non pour les pères.
Malgré les hausses tendancielles de leurs niveaux d’éducation et d’expérience professionnelle, les femmes salariées du secteur privé gagnent en moyenne, en 2015, 18 % de moins que les hommes en équivalent temps plein [Berger et al., 2017]. Plus de la moitié de cet écart demeure une fois neutralisées les différences de caractéristiques productives observées (expérience, éducation, catégorie socio-professionnelle, etc. [Coudin et al., 2017]). La littérature met en avant deux types de mécanismes pour expliquer ce phénomène : d’une part, la diversité des politiques de rémunération des entreprises et, d’autre part, l’impact différencié des naissances des enfants sur les carrières professionnelles des femmes et des hommes.
Lecture : à 35 ans, les femmes gagnent en moyenne 2,40 de l’heure (log) contre 2,53 pour les hommes. À cet âge, les mères touchent un log salaire moyen de 2,38 (contre 2,44 pour les femmes sans enfant) et les pères de 2,56 (contre 2,48 pour les hommes sans enfant). L’âge médian à la première naissance est de 27 ans chez les femmes et 29 ans chez les hommes. Champ : 1995-2015, salariés du secteur privé de France métropolitaine âgés de 16 à 65 ans, hors agriculteurs exploitants, artisans-commerçants ayant statut de salariés, apprentis, stagiaires, salariés des particuliers employeurs, activités extraterritoriales et postes annexes. Sources : Insee, panel « tous salariés » ; échantillon démographique permanent (EDP).
Cette étude confirme une piste déjà explorée par d’autres chercheurs en sciences sociales: sur l’écart observé entre les salaires des hommes et des femmes, la plus grande partie des écarts demeure liée au statut parental davantage qu’au genre.
Les inégalités entre hommes et femmes sembleraient moins importantes entre hommes et femmes qu’entre pères et mères. En observant cette courbe, on comprend qu’il y aurait moins d’écarts de salaires entre hommes et femmes s’ils n’avaient pas d’enfants, puisque l’arrivée d’enfants semble à la fois profiter au salaire des pères et nuire au salaire des mères.