En moyenne, sur l’ensemble des fonds français ouverts au public, c’est-à-dire près de 6 000 fonds, les frais courants se sont élevés à 1,37 % en 2015. Et encore, cette moyenne englobe aussi bien les fonds proposés aux investisseurs institutionnels, qui ont souvent des frais plus légers, les frais étant bien plus élevés dans les fonds destinés aux particuliers. Au final, en additionnant les frais courants et commissions de surperformance, le total des frais atteint en moyenne 2,23 % pour les fonds d’actions françaises et 2,15 % pour les fonds d’actions européennes. Et ça c’est sans compter les frais de l’assurance vie. Si ces fonds sont souscrits dans le cadre d’un contrat multisupport prélevant 1% de frais de gestion, les frais dépassent bien 3% par an, sans que les conseillers informent vraiment les épargnants du poids de ces frais et de leur impact sur la rentabilité de leur argent.
Les frais sont une des caractéristiques les plus importantes des placements financiers, comme on l’écrit souvent sur Deontofi.com. Or, lors de ses visites mystère menées auprès des réseaux bancaires, le gendarme boursier constate année après année, « que les frais des placements financiers sont insuffisamment portés à la connaissance des clients ». Dans la dernière publication de son observatoire de l’épargne, l’AMF rappelle que ce manque d’information est d’autant plus grave avec la chute des taux d’intérêt qui « met en lumière la place cruciale de ces frais dans la performance à long terme des investissements ». C’est un vrai problème mais beaucoup d’épargnants l’ignorent, d’abord parce que leur conseiller oublie de leur parler des frais quand ils leur vendent des placements, et ensuite parce qu’ils n’ont pas les connaissances pour apprécier réellement l’impact des frais sur la rentabilité de leur épargne. Résultat, le gendarme de la Bourse craint que « beaucoup d’investisseurs sous-estiment l’impact des frais et ne disposent donc pas d’une information complète sur la pertinence de leurs placements ».
Mettre des chiffres peut être utile. En cherchant bien on peut trouver chez Amundi, le plus gros acteur français du secteur, quelques éléments. Ainsi Les revenus nets de gestion s’élevaient à 1.603 millions, 1.320 en 2014, 1.400 en 2013 et 1.376 en 2012. Les revenus nets sont décomposés en commissions nettes de 1.466 millions d’EUR en 2015 auxquelles viennent s’ajouter 138 millions d’EUR de commissions de surperformance. Ces chiffres étaient respectivement en 2014 de 1.320 millions et 170 millions (Document de référence 2015 Amundi page 138), en 2013 de 1.238 et 162 et en 2012 de 1.211 et 166 (Document de base Octobre 2015 page 12).
Ainsi en 4 ans les commissions de surperformance atteindraient un total de 636 millions.
Les commissions de surperformance provenaient en 2015 pour 68 millions des taux y compris trésorerie (donc monétaire) et 70 millions des autres classes d’actifs (actions, diversifié, etc), contre 102 et 69 en 2014. (Document de référence 2015 Amundi page 140), 113 et 49 en 2013, 129 et 37 en 2012, soit sur 2012-2015 un total respectif de 412 millions pour les taux et 225 millions pour les autres classes d’actifs.
Ces seuls chiffres ne méritent-ils pas réflexion?
D’autres grandes sociétés de gestion sont-elles aussi transparentes sur ces chiffres?
5,7 milliards d’euros de frais de gestion prélevés par Amundi en 4 ans, dont 637 millions d’euros de frais de surperformance « discutables » ! Sur combien d’actifs ? Merci en tout cas cher lecteur pour ces chiffres édifiants et votre contribution à la transparence sur ce sujet délicat.
La lettre de l’observatoire de l’épargne d’octobre 2016 à la quelle il est fait référence précise: « Commission de surperformance
Lorsqu’elle est prévue par l’OPC, la commission de surperformance est due lorsque l’OPC a dépassé les objectifs de performance
fixés préalablement. Le DICI présente cette commission de façon distincte, à côté des frais courants. »
L’AMF ne précise malheureusement pas que ces frais de surperformance sont le plus souvent injustifiés voire illégitimes ou illégaux. Ainsi le prélèvement de frais de superformance sur une base annuelle peut être analysé comme une captation d’actifs ou vol si n’est pas prévu en cas de sousperformance une restitution de frais à un taux au moins équivalent. A votre avis combien de DICI prévoient une telle disposition?
Pour les fonds monétaires plus le crédit se détériore, plus les risques et les spreads sont élevés plus les commissions de performances encaissées par les sociétés de gestion sont élevées. La surperformance ne vient donc aucunement d’une quelconque compétence du gérant. Les sociétés de gestion se trouvent clairement en conflit d’intérêt avec leurs clients épargants. De telles commisions devraient être interdites.
Combien rapportent ces commissions de performance? par types d’actifs? au fil des ans. Pouvez vous nous donner des chiffres?
Merci cher lecteur pour ces questions pertinentes, auxquelles il est bien difficile de répondre puisque, comme vous le mentionnez, beaucoup de sociétés de gestion ne satisfont pas à leurs obligations d’information dans ce domaine.
Une enquête réalisée il y a quelques années par la rédaction d’un magazine financier dont j’étais le rédacteur en chef avait montré que les bases de données habituellement utilisées pour observer et comparer les performances des fonds, ne permettaient pas de connaître leurs pratiques réelles en matière de frais détaillés (commissions de surperformance, frais de courtage et commissions de mouvements payées par le fonds sur chaque transaction, etc.).
Vous avez aussi parfaitement raison de mettre en doute la légitimité et l’honnêteté des frais de superformance. Certains fonds utilisent un mode de calcul de leur prélèvement, dit « marque de marée haute » (high-water mark »), consistant à ne pas prélever de frais de surperformance tant que le fonds n’est pas remonté au-dessus de son précédent record.
Mais bien d’autres fonds abusent des frais de surperformance, en choisissant par exemple un indice de référence de leur surperformance sans rapport avec les actifs du fonds. Par exemple des frais de surperformance correspondant à 10% de la performance supérieure au taux Euribor (proche de zéro) est malhonnête si elle est prélevée sur un fonds principalement investi en actions, car cela aboutit à récompenser le gérant pour l’écart de performance entre le marché des actions et le marché monétaire, totalement indépendant de la chance ou de compétences du gérant.