En plus des plaintes pour le compte d’épargnants parties civiles, en marge des procédures pénales attendues contre Aristophil et ses acolytes, deux cabinets d’avocats proposent aux victimes des pseudo-placements en lettres et manuscrits d’en réclamer l’indemnisation auprès du liquidateur de la société, et surtout auprès de ses banques.

Le sac de nœuds d'Aristophil est tel qu'on ne sait pas bien ce qui appartient réellement à qui, ni ce qui a disparu. Un vrai défi pour restituer leurs lettres et manuscrits aux épargnants spoliés. (Photo CEO)

Le sac de nœuds d’Aristophil est tel qu’on ne sait pas bien ce qui appartient réellement à qui, ni ce qui a disparu. Un vrai défi pour restituer leurs lettres et manuscrits aux épargnants spoliés. (Photo CEO)

Deux cabinets d’avocats ont annoncé la tenue de réunions publiques pour informer les victimes d’Aristophil des procédures en préparation pour les aider à récupérer les économies englouties dans cette carambouille.

Demain, samedi 21 mars, le cabinet Lecoq-Vallon & Feron-Poloni invite les épargnants spoliés d’Aristophil à une réunion publique, de 9h à 13h, dans la salle auditorium de la Maison du Barreau de Paris, 2-4 rue de Harlay dans l’île de la Cité, face à l’entrée Ouest du Palais de Justice.

Puis le samedi suivant, 28 mars, le cabinet Lysias Partners invite à son tour les victimes des lettres et manuscrits à une réunion d’information, de 13h30 à 15h, dans ses locaux au 39 rue Censier, à Paris, entre la rue Mouffetard et le Jardin des Plantes.

Deuxième piste : la liquidation-partage

Maîtres Jean-Pierre Mignard, Benoît Huet et François de Cambiaire, avocats du cabinet Lysias Partners, présenteront la stratégie judiciaire et les solutions qu’ils préconisent pour aider les souscripteurs de contrats Aristophil à recouvrer les sommes qu’ils ont investies.

Parmi leurs pistes privilégiées, ils évoqueront la procédure de redressement judiciaire initiée contre Aristophil par le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 16 février 2015, en examinant les conséquences légales de cette procédure, notamment en terme de délais à respecter par les investisseurs pour préserver leurs droits.

Quand une société est insolvable et que son redressement est illusoire, elle est mise en liquidation, c’est-à-dire qu’on liquide tous ses actifs pour rembourser ses créanciers, en partageant le fruit de la vente entre eux selon les règles prévues par la loi (créanciers prioritaires, dettes subordonnées, etc.).

Un administrateur judiciaire est désigné pour effectuer ce travail, qui consiste à faire l’inventaire des actifs et des dettes, en examinant notamment les demandes que lui adressent les créanciers. Dans le cas d’Aristophil, cette tâche a été confiée à Maître Gérard Phillippot, 60 rue de Londres, 75008 Paris. C’est à lui que les épargnants spoliés d’Aristophil devront écrire, directement ou par l’intermédiaire de leurs avocats, pour faire connaître leurs requêtes.

Deux types de requêtes sont possibles dans une procédure de liquidation, avec des délais différents, selon que l’on réclame le paiement d’une dette (délai de deux mois) ou la restitution de biens confiés à la société en faillite mais qui ne lui appartiennent pas (délai de trois mois), comme les lettres et manuscrits conservés par Aristophil pour le compte de ses clients.

Dans ce dernier cas, les épargnants doivent présenter une « revendication ». « La revendication est une procédure spécifique au droit des faillites, selon laquelle le propriétaire d’un objet entre les mains de la société en faillite doit revendiquer le bien lui appartenant dans un délai de trois mois suivant la publication au Bodacc de la mise en redressement judiciaire d’Aristophil », explique Maître Nicolas Lecoq-Vallon, qui prévoit aussi d’effectuer cette procédure pour ses clients.

La mise en liquidation d’Aristophil a été publiée dans le Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc) du 10 mars 2015. Les clients spoliés d’Aristophil ont donc jusqu’au 10 juin 2015 pour réclamer, auprès de Maître Phillippot, la restitution des lettres et manuscrits qui leur appartiennent.

Mais cette démarche promet d’être un sac de nœuds incroyable, surtout pour les lettres et manuscrits achetés par les épargnants en indivision, dans le cadre de conventions de type Coralys (notez au passage la subtile confusion entretenue avec un contrat d’assurance vie d’AXA bien connu, baptisé Coralis).

« Pour chaque indivision, il faudra qu’un administrateur parvienne à réunir les clients indivisaires en assemblée générale pour trouver un accord collectif satisfaisant au mieux les revendications de chacun », explique Maître Lecoq-Vallon.

Certains voudront sortir de l’indivision, mais en récupérant quelles œuvres, selon quelles évaluations ? D’autres voudront vendre l’ensemble pour liquider l’indivision et partager l’argent récupérable. Des clients auront fait des revendications mais ne seront pas aux assemblées d’indivisaires, quand d’autres y viendront sans avoir fait de revendication dans la liquidation.

Enfin cette procédure est conditionnée à la levée des scellés sur le patrimoine d’Aristophil, qui fait pour l’instant l’objet d’une saisie par le parquet. Les 180 000 lettres et manuscrits acquis par les épargnants sont sous scellés pour éviter leur évaporation, tandis que les comptes de la société ont été mis sous séquestre depuis le 18 novembre 2014, jour de la perquisition aux adresses d’Aristophil et de ses instigateurs.

"Mais où est donc passée ma lettre de Napoléon ?", s'interroge un client de Gérard Lhéritier, à propos de ce document qu'Aristophil a vendu sans en avoir le droit de propriété.

« Mais où est donc passée ma lettre de Napoléon ? », s’interroge un client de Gérard Lhéritier, à propos de ce document qu’Aristophil a vendu, on ne sait comment, sans en avoir le droit de propriété.

La situation semble plus simple, mais guère plus encourageante, pour les clients ayant acheté des produits baptisés Amadeus, en pleine propriété. Toujours dans l’hypothèse d’une levée de la saisie du parquet, ils pourront revendiquer la propriété de leurs lettres et manuscrits confiés à Aristophil. À condition qu’on les retrouve. Car certains ont été revendus à l’insu de leurs propriétaires !

Deux lettres de Napoléon acquises par une cliente d’Aristophil le 27 octobre 2010 ont ainsi été revendues à son insu quelques jours plus tard aux enchères, le 9 novembre chez Christie’s, et le 22 novembre 2010 chez Pierre Bergé & Associés. « À moins qu’Aristophil ait lui-même acheté aux enchères ces manuscrits qu’il avait déjà vendu à sa cliente alors qu’il ne les possédait pas encore ? », s’interroge son représentant.

Dans le meilleur des cas, en admettant que des clients spoliés parviennent à retrouver et récupérer les lettres et manuscrits qui leur appartiennent dans la procédure de liquidation, ces derniers seront invendables au prix exorbitant qu’ils les ont payé.

« Parallèlement à la revendication de leurs biens, les clients ont donc intérêt à présenter aussi une déclaration de créance dans la procédure de liquidation », poursuit Nicolas Lecoq-Vallon.

La créance correspond à ce que chaque client estime qu’Aristophil lui doit. Sur la base de la rentabilité attendue de leurs pseudo-placements, cette créance devrait correspondre au montant investi augmenté des intérêts (par exemple 50% sur cinq ans), des frais de procédure judiciaire, et des dommages et intérêts pour le préjudice moral résultant de cette mauvaise farce.

Cette procédure doit être tentée, pour ne négliger aucune piste et optimiser les chances d’indemnisation, mais elle sera longue pour des résultats très incertains.

La piste suivante en particulier : Les banques mises en cause dans le scandale Aristophil

Lisez aussi : Toute la saga d’Aristophil sur Deontofi.com (sommaire du feuilleton en bas de cette intro)

2 commentaires

  1. galinier Laurent, le

    Bonjour
    Votre article est ARCHI Faux.
    La société Aristophil n est pas en liqudation judiciaire mais en redressement judiciaire.
    Je vous conseille de changer de métier.
    On peux se poser la question vous êtes payé par qui. Apparemment vous aimez publier de fausses informations (Pour le compte de qui ?)

    • Gilles Pouzin, le

      Merci, cher lecteur Aristophilou, pour ce commentaire aussi aimable que pertinent.

      La saga des turpitudes d’Aristophil est si riche en révélations que nous n’avons pas souhaité l’alourdir par un traité sur le droit des faillites.

      Dans cet esprit, nous avons exposé le raccourci que vous évoquez dans les termes suivants : « Quand une société est insolvable et que son redressement est illusoire, elle est mise en liquidation ». La procédure de « redressement » est obligatoire, même quand elle est illusoire, c’est la raison pour laquelle elle est réduite à deux mois pour Aristophil dans le cadre de sa liquidation, qui n’est pas une hypothèse mais une certitude (à moins que vous ne vouliez la racheter avec son passif financier et judiciaire, pour rembourser les dettes de votre poche!).

      Pour simplifier la lecture, nous avons donc décrit cette étape en intégrant le « redressement » dans la procédure de liquidation dont il fait partie, comme on peut le vérifier au Bodacc du 10 mars 2015 p.210-211 :

      « Complément de jugement : Jugement prononçant l’ouverture d’une
      procédure de redressement judiciaire désignant : administrateur Me
      Gérard Philippot 60 rue de Londres 75008 Paris, avec pour mission
      : d’administrer, mandataire judiciaire Selafa Mja en la personne de
      Me Valérie Leloup-Thomas 102 rue du Faubourg Saint-Denis 75479
      Paris Cedex 10 – Selarl Emj en la personne de Me Bernard Corre 62
      boulevard de Sébastopol 75003 Paris. Les déclarations des créances
      sont à déposer au mandataire judiciaire dans les deux mois à
      compter de la présente publication. »

      Le jugement de liquidation consécutif au redressement, qui sera officiel dans moins d’un mois, intégrera cette étape et il n’est donc pas faux, pour le grand public, de parler de liquidation dès aujourd’hui, même si les chers amis juristes d’Aristophil savent bien distinguer le sens technique de chaque terme, généralement pour embrouiller l’opinion comme dans ses fameux contrats de pseudo-placements trompeurs.

      Vous demandez par ailleurs par qui est payé Deontofi.com ? La réponse est dans nos mentions légales, et Les vœux de Deontofi.com en 2015 : développer l’information sur la déontologie financière.

      Pour le reste de vos sympathiques dénigrements, c’est une récompense des plus flatteuse pour un journaliste indépendant dénonçant les secrets honteux que d’autres veulent cacher.
      En 1991, à 24 ans, lorsque j’étais poursuivi en diffamation par un escroc dénoncé dans mon premier dossier à la Une du Nouvel Economiste titré « Bourse, attention aux arnaques! », mes confrères m’avaient félicité pour mes révélations, et les escrocs avaient fini par tomber.
      Alors, vous en demandez encore ?
      Merci à tous les escrocs pour vos encouragements ! On n’arrête pas l’info sur Deontofi.com.
      Bonne lecture et à bientôt pour de nouveaux épisodes.
      Gilles Pouzin, Journaliste fondateur de Deontofi.com

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