Créé il y a une douzaine d’années, dans le cadre de la réforme des retraites de 2003, dite Loi Fillon, le Plan d’épargne retraite populaire (Perp) n’a jamais séduit les épargnants malgré le battage publicitaire des banques pour en faire la promotion auprès des épargnants, surtout après son lancement. A l’occasion d’une chronique sur les avantages et inconvénients du Perp, Deontofi.com revient sur l’échec relatif de ce plan de retraite par capitalisation individuel.

Créé en marge de la réforme des retraites de 2003, dite Loi Fillon, le Plan d'épargne retraite populaire (Perp) souffre d'un défaut majeur pour bien des épargnants : l'impossibilité de récupérer leur capital. (photo © GPouzin)

Créé en marge de la réforme des retraites de 2003, dite Loi Fillon, le Plan d’épargne retraite populaire (Perp) souffre d’un défaut majeur pour bien des épargnants : l’impossibilité de récupérer leur capital. (photo © GPouzin)

Cinq minutes pour comprendre :
Retrouvez ici l’interview TV sur ce thème dans l’émission Ecorama du 02/11/2015

Il est souvent difficile de trouver des chiffres détaillés sur le profil des détenteurs d’un type de placement spécifique. C’est le cas pour le Perp, sur lequel on dispose d’informations éparses. Les données les plus à jour sur cette sous-catégorie de produits d’assurance retraite sont publiées par l’Association française d’assurance (regroupant les assureurs privés adhérents de la FFSA et les assureurs mutualistes membres du Gema), dans son édition des données clés 2014 sur les assurances de personnes.

À coup de promotion sur les cadeaux fiscaux du Perp, et de conseils légitimement anxiogènes sur le thème « ne comptez pas sur la retraite obligatoire qui s’écroule », les réseaux bancaires et d’assurance sont parvenus à faire souscrire des dizaines de milliers de nouveaux Perp à leurs clients chaque année, passant même la barre des 100 000 nouveaux Perp ouverts en 2014.

Peut-on parler de bide face à une telle tendance ? Certainement, car ce succès reste très relatif, au regard des moyens mis en œuvre pour fourguer ce placement tunnel à qui mieux-mieux sans considération de leur adéquation réelle aux besoins des clients. J’ai souvenir d’une conversation avec un représentant syndical d’un grand réseau bancaire qui se plaignait des objectifs de vente de Perp assignés à ses collègues dans une agence frontalière dont l’essentiel des clients n’étaient pas imposés en France. Premier défaut de conseil : le Perp n’a aucun intérêt si l’on n’est pas taxé à un des taux les plus élevés d’impôt sur le revenu.

On sait aussi que sous la pression aveugle des objectifs de vente, les commerciaux des réseaux bancaires ont même refourgué « du Perp », comme diraient les maquignons, à des clients déjà retraités, ce qui semble à la limite de l’escroquerie.

Quoi qu’il en soit, les résultats sont là : 104 000 nouveaux Perp ouverts en 2014, portant sa population totale à près de 2,3 millions de Perp (2 280 000). Une autre étude plus ancienne du Comité consultatif du secteur financier (CCSF) nous apprend que, fin 2012, « le taux de détention des PERP en phase d’épargne pour l’ensemble de la population des salariés en activité (soit la population cible) est de 9,1% ». Voilà pour le succès.

Approchez-vous des chiffres pour comprendre l’échec : les cotisations versées sur les Perp ont atteint 1,815 milliard d’euros en 2014. C’est beau, mais ridicule par rapport à l’assurance vie (105 milliards de versements en 2014).

Pire. Divisez ce total de versements par le nombre de Perp. Vous obtenez un versement annuel moyen sur chaque Perp inférieur à 800 euros en 2014 (796 € précisément). Le problème n’est pas tellement que le Perp recueille des versements modestes, car les petits ruisseaux font les grandes rivières. Mais cet  indice confirme sa commercialisation auprès d’épargnants modestes qui en connaîtront probablement plus les inconvénients que les avantages.

Vérification. L’épargne totale accumulée fin 2014 sur les 2,3 millions de Perp ouverts en France, atteignait 12,3 milliards d’euros. Une petite division permet de vérifier que l’encours moyen d’épargne retraite était donc inférieur à 5400 euros sur chaque Perp (5391 € précisément).

De même, on apprend par le CCSF qu’environ 20% des cotisations sur les Perp sont investies en unités de compte contre 14% pour les contrats d’assurance-vie multisupports, à fin 2012. Là aussi, rien ne garantit que ce soit une bonne idée compte tenu des empilements de frais caractérisant souvent ces supports.

Certes, la plupart de ces Perp sont encore en phase de constitution, et l’âge moyen de leurs détenteurs est de 46 ans, ce qui leur laisse en pratique encore une vingtaine d’années pour préparer leur retraite (en extrapolant à peine les réformes).

Mais ce n’est pas en donnant 800 euros par an à leur assureur contre une vague promesse de rente que nos concitoyens compenseront l’incertitude de la retraite Sécu ou Agirc-Arrco. Même si « l’encours moyen des plans en phase de liquidation est de 30 700 euros », à fin 2012 selon le CCSF, il faut garder à l’esprit que cela représente à peine 80 euros de revenu complémentaire par mois à la retraite, au taux de conversion actuel d’environ 3%.

Là aussi, ces chiffres laissent planer un fort soupçon de commercialisation inappropriée des Perp à des épargnants qui ne sont pas suffisamment taxés pour que le cadeau fiscal sur les versements compense l’impossibilité de récupérer leur capital en cas de besoin et l’impossibilité d’en percevoir des revenus avant l’obtention de leur retraite obligatoire.

Cinq minutes pour comprendre :
Retrouvez ici l’interview TV sur ce thème dans l’émission Ecorama du 02/11/2015
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