Les propositions d’investissements farfelues sont de retour. Avec les turbulences boursières et le faible rendement des placements traditionnels, les épargnants sont sollicités pour investir dans des projets d’énergies renouvelables faisant miroiter des garanties de rendement et de remboursement du capital illusoires. Peut-on croire à ces garanties ? S’agit-ils de promesses trompeuses ? Quels sont les risques ? Les réponses de Deontofi.com, le site de la déontologie financière.

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Ne tombez pas dans le panneau solaire ! Les promesses d’investissements à revenus et capital garanti dans les centrales photovoltaïques sont bidon. Deontofi.com vous explique pourquoi les garanties sont inopérantes avec des cas réels ayant ruiné les épargnants. (photo © GPouzin)

Cinq minutes pour comprendre :
Retrouvez ici l’interview TV sur ce thème dans l’émission Ecorama du 05/10/2015

1/ Des revenus de 6% par an et un capital garantis en investissant dans des panneaux solaires, c’est possible ?
Non, c’est du vent, pour les panneaux solaires comme pour les éoliennes d’ailleurs ou n’importe quel autre projet d’entreprise sollicitant l’argent des épargnants. C’est assez agaçant de voir que des intermédiaires peu scrupuleux continuent régulièrement à exploiter la crédulité des épargnants en leur faisant miroiter des avantages et des caractéristiques illusoires. L’autorité des marchés financiers a d’ailleurs publié une mise en garde des investisseurs contre les risques d’investissements France Energies Rendement faisant miroiter des rendements prétendument assurés de 4 à 7% par an. Le problème est que ces promesses sont présentées de façon assez crédibles pour les néophytes, avec un baratin qui fait sérieux, alors qu’elles sont parfaitement trompeuses.

2/ On se doute bien qu’il y a un loup quand on reçoit une proposition d’investissement promettant 6% de rendement à capital garanti, mais en quoi est-ce trompeur ?
C’est trompeur car ces garanties n’ont pas beaucoup plus de valeur que la parole d’honneur d’un bonimenteur de foire. Ce sont des promesses en l’air qui ne reposent sur absolument aucune sécurité financières sérieuse, mais seulement sur la bonne parole de celui qui les fait.

3/ Mais peut-on écrire dans une brochure commerciale que l’on promet 6% de revenus et la garantie du capital s’il n’y a rien derrière ?
Justement, toute la tromperie est là, car il y a bien un habillage qui laisse croire que ces revenus et le remboursement du capital seraient effectivement garantis, mais cet habillage n’a absolument pas la solidité juridique ni la sécurité financière que les épargnants sont en droit d’attendre quand on leur fait de telles promesses.

4/ Pourtant les publicités évoquent souvent des contrats de rachat par EDF de l’électricité produite avec les énergies renouvelables, c’est quand même une garantie, non ?
La seule garantie que l’on a, c’est de pouvoir vendre l’électricité produite, ce qui est déjà pas mal. Mais les revenus de votre électricité verte sont bien moins garantis que ce qu’on vous fait croire. D’abord parce que les recettes de ces investissements en énergie renouvelables dépendent du vent ou du soleil, et comme l’observait un lecteur, il n’y a pas d’assurance contre les éclipses. Ensuite parce qu’il serait illusoire de croire que vos panneaux solaires vont avoir une production constante pendant vingt ans. Comme tous les appareils électriques, leur efficacité diminue avec les années. En plus il y a les tempêtes, la grêle, le gel, ils se rayent, ils se cassent, il faut les entretenir, les réparer, les changer. Tout cela coûte de l’argent.
Ces revenus ne sont donc pas garantis dans l’absolu, ils sont garantis si le vent souffle, que le soleil brille et que l’Etat maintient sa politique de prix subventionnés.
Il est vrai aussi que l’électricité écologique vendue à EDF bénéficie de tarifs subventionnés avantageux et plus ou moins garantis, mais ces garanties évoluent et exigent des contreparties compliquées de la part des exploitants, comme en témoignent les centaines de litiges administratifs et fiscaux liés aux délais de raccordement au réseau EDF ou au prix plafond d’investissement pour bénéficier de certains avantages. On vous parle de contrats garantis sur vingt ans avec EDF, mais dans la pratique les prix sont révisés tous les trimestres par le ministère du développement durable qui promet seulement que « la baisse des tarifs est plafonnée à 20% par an ».
Même EDF l’écrit noir sur blanc sur son site internet : « Pour la première année, le prix d’achat de l’électricité solaire photovoltaïque est défini dans le contrat que vous signez. Pour les années suivantes, il peut varier, à la hausse ou à la baisse ».

5/ Comment a évolué le prix de l’électricité solaire vendue à EDF ? Peut-on donner des exemples ?
– Là aussi, c’est assez confus, car il n’y a pas un tarif unique mais des grilles de prix qui varient non seulement dans le temps mais aussi selon la nature du bâtiment (résidentiel, enseignement et santé ou autres bâtiments agricoles, etc.),  du type d’installation (totalement intégrée au bâti –IAB- ou dans une intégration simplifiée au bâti –ISB-), et de sa capacité de production. Il y avait au départ une douzaine de tarifs différents jusqu’en 2013. La grille a été simplifiée, avec seulement trois tarifs aujourd’hui, mais les prix se sont écroulés. Par exemple pour les particuliers qui ont une centrale solaire intégrée à leur toit de moins de 9kW, le prix de rachat par EDF est tombé à 26,17 centimes pour les contrats signés au second trimestre 2015, contre 42,55 c€/kWh pour les contrats signés avant juillet 2011, soit une baisse de 38,5% en quatre ans ! Pour les panneaux solaires installés avec une intégration simplifiée au bâti (ISB) de 36 à 100kW, ce qui correspond à la plupart des hangars industriels ou agricoles par exemple, le prix de rachat a été carrément divisé par deux, passant de 28,83 c€/kWh pour les contrats signés avant juillet 2011 à 13,25 centimes pour ceux conclus au second trimestre 2015, soit un recul de 54%.
Enfin pour les installations ordinaires, sans aucune intégration aux bâtiments, le prix de rachat a aussi été réduit de 46%, passant de 12 centimes à 6,45 c€/kWh, ce qui donne aussi une idée du vrai prix de l’électricité sur le marché.

6/ Pour revenir aux promesses d’investissement en énergie renouvelables, que valent leurs contrats et y a-t-il des garanties financières réelles derrière ces promesses ?
Déjà, il est souvent difficile, voire impossible de se procurer les contrats pour les étudier en détail au regard des promesses figurant dans les brochures. Nous avons eu le cas récemment avec un lecteur sollicité par la société Legendre Patrimoine pour un investissement photovoltaïque de ce type, et qui n’avait pu obtenir que la brochure pleine de promesses, mais pas les contrats détaillant le cadre juridique de ces promesses. Ensuite, dans le cas des panneaux solaires, il s’agit d’investir dans une société en participation, c’est-à-dire une société informelle entre personnes, échappant au formalisme et aux obligations déclaratives habituelles des entreprises vis-à-vis de leurs associés et actionnaires. Au bout du compte, on a non seulement des garanties bancales sur le plan contractuel, en plus des aléas liés à la production, à la réglementation et aux subventions, mais en plus ces prétendues garanties ne s’appuient sur aucune sécurité sérieuse puisqu’elles ne sont garanties que par celui qui fait la promesse, et dont la solvabilité est totalement illusoire par rapport à une vraie garantie financière comme celle d’une banque ou d’un assureur. On a malheureusement un bon exemple de ce décalage entre discours et réalité avec Solabios, qui se flattait en décembre 2009 d’avoir collecté 3 millions d’euros auprès des épargnants avec la première holding photovoltaïque ayant obtenu un visa de l’AMF pour investir dans des centrales solaires présentées comme « un placement aux revenus réguliers et à fort rendement (8%) », et qui s’est écroulée deux ans plus tard avec scandale et procès à la clé pour des milliers d’épargnants ruinés, en plus d’une amende circonstanciée de l’AMF de 50 000 euros dès 2013.

En résumé, les risques de déception sont à la hauteur de la fausse idée que l’on peut se faire de ces prétendues garanties : l’investissement dans les énergies renouvelables à revenus garantis sans risque de perte en capital, ça n’existe pas, c’est une supercherie !

Cinq minutes pour comprendre :
Retrouvez ici l’interview TV sur ce thème dans l’émission Ecorama du 05/10/2015

Lire aussi : Les illusions photovoltaïques inquiètent le gendarme boursier
La décision de sanction de l’AMF contre Solabios et ses panneaux solaires à 8% ayant fait faillite !
Gare aux pièges des placements en biens divers et entreprises extraordinaires !

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4 commentaires

  1. LEFORT, le

    Bonjour (30-10-2016)

    Nous avons une installation de 2970 kw depuis mi-Aout 2010 effectué par la société Sol’Art désormais disparue.
    Cette société nous a garantie 1710 € de revenu net par an pendant 20 ans ( contrat EDF) en tenant compte de la perte de rendement inévitable des panneaux ( monocristallins)

    Coût initial de l’installation 18300 € ( arrondi ) avec garantie remplacement de l’onduleur après 10 ans .
    Crédit d’impôt : 8300 € ( 4 pers)
    Revenus net d’impôt avec TVA de 5 %
    Soit 10 000 € investi ,sans emprunt.
    Prix de rachat Aout 2010 : 0.58 €/kw

    Coût entretien : 10 € par an car nettoyage à l’eau clair des panneaux.

    Nous sommes en octobre 2016 et avons un revenu moyen sur les 6 dernières années de 1850 € net ( avec location compteur EDF déduit ..)

    Coût rachat aout 2016 : 0.59532 € (je n’ai JAMAIS eu de baisse)

    Nb: nous sommes dans le 49 et exposé légèrement sud-Est

    Conclusion que du bonheur (petit plus nous avons revendu les 20 m2 d’ardoises retirées environ 100 € ).

    Cdt.

  2. Alain Nyiri, le

    Et oui… Belles promesses sur Saint Martin : crédit in fine de 201 000 €, pour un bien qui perd en quelques années la moitié de sa valeur et qui va de réparations en réparations. Promesse initiale de revalorisation au moins de 1 % « puisque le terrain constructible devient une vraie rareté »… Confiance , puisque manifestement d’excellents contacts avec les pouvoirs politiques locaux. On aimerait les entendre à présent. Je repense à Chabrol et son « Escroc mais pas trop ». Un remake ?

  3. woz, le

    « On vous parle de contrats garantis sur vingt ans avec EDF, mais dans la pratique les prix sont révisés tous les trimestres par le ministère du développement durable »
    Vous interprétez mal cette information. Le vendeur d’énergie photovoltaïque signe avec OA (Obligation d’Achat photovoltaïque) un contrat sur 20 ans (c’est juste) mais le prix du kW.h ne baisse pas tout les trimestres. Par contre, un contrat signé 3 mois après pourra l’être avec un prix différent mais toujours garanti sur 20 ans. Depuis 2010 (0,618 €/kW.h pour l’intégré au bâti, puissance inférieur à 36 kW) le prix a beaucoup baissé : aujourd’hui environ 0,25 €/kW.h et les conditions sont plus contraignantes mais celui qui a signé en 2010 à 0,618 €/kW.h continue de percevoir ce prix par kW.h vendu. Pour info je le vis pour mon installation et je ne pense pas (j’en suis sur) que OA me fasse une tarification préférentielle.
    De plus les contraintes sur l’installation, purement franco-française devraient diminuer en 2016. D’autant que les contraintes d’intégration au bâti diminuent de manière importante le rendement (production électrique) de l’installation aux moments les plus favorables (juin à août).
    Concernant l’existence de sociétés peu scrupuleuses dans le domaine du photovoltaïque : c’est exact néanmoins une installation photovoltaïque bénéficiaire c’est possible (pas évidemment 8%/an) et l’entretien est bien moins important que ce que vous affirmez. Le problème pour une éventuelle réparation (changement d’onduleur par exemple) c’est la disparition assez fréquente de la société qui a réalisé l’installation (société reconvertie par exemple dans la vente d’aspirateur ou de boissons gazeuses avec le même niveau de compétence) : il faut alors trouver un artisan acceptant de prendre en charge la réparation (facile pour un changement d’onduleur, plus délicat pour un changement de panneau).
    C’est différent pour les éoliennes (les vraies, celles de plus de 18m) : il faut plusieurs dizaines d’éoliennes pour obtenir de façon certaine un rendement financier positif. C’est lié aux nombres de pièces en mouvement qui nécessitent une réelle maintenance (de plus assez complexe donc nécessitant des sociétés très spécialisées) et aux taux de pannes. Exemple : une personne possède une éolienne, elle tombe en panne. La société assurant la maintenance va parfois mettre plusieurs semaine avant de venir d’où une perte totale de production. Si on (un groupement de personnes) possède plusieurs dizaines d’éoliennes, un technicien assurera de manière quasi permanente une fonction de maintenance d’où une réactivité plus importante et un lissage d’une éventuelle perte de production.
    Donc ce n’est pas aussi binaire que vous l’affirmez dans votre article. Les investissements sont conséquents et nécessitent un minimum de capacités à étudier les aspects techniques et économiques d’un projet.

    Pour aller dans votre sens : beaucoup de sociétés à la limite de l’escroquerie dans ces secteurs (photovoltaïque et petit éolien) mais aussi des sociétés sérieuses qui pâtissent des actions des premières. Mais on pourrai dire la même chose pour le bâtiment, le traitement de l’eau etc..

    • Gilles Pouzin, le

      Bonjour cher lecteur et merci pour votre complément d’information très utile et documenté.
      Votre précision aide à comprendre la différence entre la baisse des prix à la signature et la baisse des prix en cours de contrat, qui sont bien deux choses différentes et cela méritait d’être reprécisé si ce n’était pas assez clair.
      En revanche, si le prix de rachat de vos Kw/h n’a jamais baissé dans votre contrat, comme vous en témoignez, ce n’est peut-être pas le cas des contrats signés ultérieurement, si l’on en croit ce qu’EDF écrit sur son propre site: « Pour la première année, le prix d’achat de l’électricité solaire photovoltaïque est défini dans le contrat que vous signez. Pour les années suivantes, il peut varier, à la hausse ou à la baisse ».
      Enfin, comme je l’explique plus en détail dans mon interview TV sur Boursorama, mon intention n’était aucunement de décourager l’investissement dans la production d’énergies renouvelables, « je connais même des investisseurs institutionnels qui financent avec succès ce type de projets d’infrastructure » (lire par exemple ici), mais de mettre en garde les épargnants contre les margoulins profitant de leur crédulité, car ce n’est pas un investissement à revenu et capital garanti sans risque.
      Faire miroiter une telle promesse relève soit de l’incompétence, soit de la malhonnêteté.
      Dans les deux cas, mieux vaut rester à l’écart de ces propositions « clé en main ».

      Merci encore pour votre contribution et bonne lecture sur Deontofi.com

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